Après le Bangladesh, l'Inde est sur le point d'éliminer la leishmaniose viscérale en tant que problème de santé publique.

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En octobre 2023, le Bangladesh est devenu le premier pays au monde à être officiellement certifié par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour l'élimination de la leishmaniose viscérale (LV) ou kala-azar en tant que problème de santé publique.

L'Inde est sur le point d'atteindre le même objectif cette année, aucun district du pays ne signalant plus d'un cas pour 10 000 habitant, seuil en dessous du quel on peut parler d'élimination. L'Inde doit maintenant poursuivre sur sa lancée au cours des 3 prochaines années afin de recevoir la certification de l'OMS.

En 2021, l’Inde avait enregistré 1 357 cas et 8 décès dus à la LV. En 2022, 891 cas et 3 décès avaient été notifiés et il restait 4 districts avec une incidence de LV supérieure au seuil d’élimination dans les Etats de Bihar et du Jarkhand. Entre janvier et octobre 2023, le pays comptait 530 cas et 4 décès. Sur la même période, 286 cas de leishmaniose cutanée post-kala azar (PKDL) ont également été signalés. Il est essentiel de guérir complètement cette atteinte cutanée, car elle peut servir de réservoir au parasite.

Le premier objectif de l'Inde pour l'élimination du kala azar était 2010. Cet objectif a ensuite été repoussé plusieurs fois. Trois interventions clés ont permis à l'Inde d'atteindre les objectifs d'élimination cette année :

  • La première a consisté à assurer une pulvérisation intra-domiciliaire d’insecticide efficace afin d’empêcher la reproduction des phlébotomes qui sont les vecteurs de la LV et se reproduisent généralement dans les crevasses des murs en terre. Des échecs des premières pulvérisation avaient été identifiés et s’expliquaient par l’utilisation de produits inefficaces ou de techniques de pulvérisation inadaptées.
  • La deuxième consistait à boucher les fissures dans les murs "kuccha" [faits de bambou, de boue, d'herbe, de roseaux, de pierres, de chaume, de paille, de feuilles et de briques non brûlées] afin de réduire les zones de reproduction des phlénotomes.
  • La troisième intervention, reposait sur les action du réseau ASHA (About Accredited Social Health Activist) qui est chargé de veiller à l’observance du traitement des personnes atteintes de PKDL.

L'un des principaux défis à relever aujourd'hui est d'assurer une surveillance rigoureuse de la LV afin de détecter les quelques cas qui se présentent. En outre, il faudra surveiller de nouvelles zones. En effet, si la plupart des cas de LV ont été signalés dans quatre États (Uttar Pradesh, Bihar, Jharkhand et Bengale occidental), des cas sporadiques ont également été signalés dans d'autres États comme Uttarakhand.

Il sera également nécessaire de garantir la disponibilité de médicaments tels que la paromomycine, utilisée pour traiter les personnes atteintes du VIH, et de LV.

Rappels sur la LV en Inde

La LV est endémique en Inde. Dans le sous-continent indien (Bangladesh, Bhoutan, Inde, Népal, Sri Lanka), elle est causée par le parasite Leishmania donovani. Dans le contexte de la région de l'Asie du Sud-Est, la leishmaniose est considérée comme une maladie anthroponotique c’est-à-dire une infection où le seul réservoir du parasite est l’Homme. En effet, il n'existe à ce jour aucune preuve directe de l'existence d'un réservoir animal pour la transmission de L. donovani. Le phlébotome péridomestique (Phlebotomous argentipes) est le seul vecteur connu, il se reproduit principalement à l'intérieur, par exemple dans les fissures et les trous des murs en terre des maisons rurales et des étables.

La maladie touche généralement les populations les plus pauvres et marginalisées. Les principaux facteurs de risque du kala-azar sont les mauvaises conditions de logement et d'assainissement domestique, comme l'absence de gestion des déchets ou d'égouts à ciel ouvert, qui peuvent favoriser la reproduction des phlébotomes et des sites de repos. Le kala-azar se caractérise par une fièvre prolongée, une perte de poids, une faiblesse, une anémie et une hépatosplénomégalie. En l'absence de traitement, le patient meurt généralement au bout de deux ans en raison d'infections intercurrentes.

La leishmaniose cutanée post-kala azar (PKDL) survient généralement entre un et dix ans après la guérison apparente du kala-azar, dans 15 % des cas. La PKDL a également été signalée de manière sporadique chez des patients n'ayant pas d'antécédents de kala-azar. La présentation clinique et l'évolution de la PKDL varient en fonction de la zone géographique. Au Bangladesh, plus de 90 % des patients présentent une éruption maculaire, tandis qu'en Inde, l'éruption est souvent polymorphe, avec un mélange de nodules, de papules et de macules.Le diagnostic du kala-azar et de la PKDL se fait en combinant un examen clinique et des tests parasitologiques, sérologiques [tels que les tests de diagnostic rapide (TDR)] ou moléculaires. Les schémas thérapeutiques recommandés par l'OMS pour le kala-azar et la PKDL repose sur l’utilisation de trois molécules (l’amphotéricine B, la miltefosine et la paromomycine) selon différents schémas thérapeutiques.

Le kala-azar est une maladie que l'on peut traiter et guérir, mais qui nécessite un système immunocompétent. Les médicaments n'éliminent pas le parasite de l'organisme, d'où le risque de rechute en cas d'immunodépression.
Référence : Regional Strategic Framework For accelerating and Sustaining elimination of kala-azar in the South-east Asia Region. 2022–2026. World Health Organization. Régional office for South East Asia.

Source : Indian Express