Une vaste étude montre que l’aluminium présent dans plusieurs vaccins n’augmente pas le risque de maladie auto-immune ou allergique et de trouble du développement cérébral chez les jeunes enfants

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La vaccination se heurte à des réticences ou des oppositions aux motivations variées et complexes, parmi lesquelles figure la crainte d’effets délétères mal évalués ou cachés. Tous les composants des vaccins sont suspectés d’avoir des effets autres que celui qui justifie leur présence, les rendant potentiellement responsables d’altérations passagères ou durables de certains organes et de leurs fonctions. Parmi ces composants, les sels d’aluminium utilisés comme adjuvants depuis des décennies et présents dans plusieurs vaccins administrés dès le plus jeune âge (diphtérie, tétanos, coqueluche, Haemophilus influenzae, pneumocoque, hépatites) sont régulièrement mis en cause. Les adjuvants ont pour rôle d’augmenter l’efficacité de la vaccination en élevant le niveau de la réponse immunitaire, parfois en l’orientant vers ses composantes les plus actives. Ils permettent aussi de réduire la quantité d’antigène présente dans les doses de vaccins.

A la différence d’autres métaux, l’aluminium n’a pas de rôle dans l’organisme, mais il s’y trouve présent en petites quantités en raison de sa très large répartition dans l’environnement. En cas d’absorption excessive ou de troubles de l’élimination (altération des fonctions hépatiques et surtout rénales), il peut s’accumuler, principalement dans les os et le système nerveux. Il peut alors être responsable d’une fragilité osseuse, ou de troubles neurologiques (anomalies du développement cérébral chez les sujets jeunes, altérations diverses chez les adultes). Ces effets, rarement observés chez l’Homme (presque exclusivement en cas d’insuffisance rénale empêchant l’élimination du métal ou d’exposition professionnelle) sont surtout décrits chez l’animal. Chez l’Homme, on a toutefois évoqué une responsabilité possible de l’aluminium dans la maladie d’Alzheimer. En fait, si on observe bien une concentration élevée d’aluminium dans les cerveaux de ces malades, on ignore encore si elle est la cause ou la conséquence de la maladie.

Nous sommes tous exposés à l’aluminium par notre alimentation (certains végétaux et additifs, le chocolat, en contiennent des quantités non négligeables, des ustensiles de cuisine et des modes de cuisson peuvent en relarguer dans les aliments, la concentration en aluminium des eaux de boisson varie avec le lieu et les modes de purification), par l’usage de produits cosmétiques (anti-transpirants), et par la prise de certains médicaments et vaccins (1). Malgré le caractère exceptionnel et particulier de la toxicité chez l’Homme, et prenant en compte l’incomplétude des connaissances, l’OMS a estimé en 2011 que l’absorption d’aluminium ne devait pas dépasser 2 mg/kg de poids corporel et par semaine, soit 17 mg par jour pour un adulte de 60 kg (auparavant, l’EFSA - Agence européenne de sécurité des aliments – avait fixé cette dose à 1 mg/kg par semaine). En France, seuls 0,2 % des adultes et 1,6 % des enfants, qui consomment plus de lait et de chocolat, dépasseraient cette limite, sans conséquences connues pour l’heure.

Les vaccins adjuvantés contiennent au maximum 0,82 mg d’aluminium par dose. Même en cas de vaccinations multiples, la quantité d’aluminium introduite reste inférieure à celle que peut apporter l’alimentation et elle n’est donc pas a priori à incriminer en cas d’effets indésirables. C’est la combinaison de l’adjuvant aluminique avec l’antigène vaccinant qui est suspectée, elle serait responsable du déclenchement de réactions immunitaires adverses, telles que la myofasciite à macrophages (MFM) décrite dans les années 1990 ou le développement d’allergies. Dans la MFM, des macrophages se rassemblent au niveau de cristaux d’hydroxyde d’aluminium laissés au point d’injection d’un vaccin. Une corrélation entre vaccin et MFM est donc établie, mais il n’y en a pas de démontrée entre aluminium et symptômes de la maladie. Les microcristaux de sel d’aluminium sont des corps étrangers qui attirent et fixent les macrophages, comme le font par exemple les encres de tatouage, mais rien ne permet à ce jour de leur attribuer une responsabilité dans un désordre à distance du site d’injection.

Tous les doutes ne sont toutefois pas levés, et on évoque les risques liés à un effet cumulatif (répétition des vaccins chez les jeunes enfants) et à un faible taux d’élimination propre à l’introduction par injection.  Une vaste étude menée récemment au Danemark apporte des données rassurantes (2). L’état de santé de 1  224  176 enfants nés entre 1997 et 2018 et toujours vivants au Danemark à l’âge de 2 ans a été examiné et corrélé à la quantité cumulée d’aluminium reçue à l’occasion des vaccinations. Les auteurs se sont intéressés à l’incidence, chez ces enfants suivis jusqu’à l’âge de 5 ans, de plus de 50 pathologies chroniques, dont des pathologies immunitaires (maladies auto-immunes, allergies) et des anomalies du développement neurologique (maladies du spectre de l’autisme, troubles de l’attention, hyperactivité). L’analyse ne montre aucune association entre les quantités cumulées d’aluminium (0 à 4,5 mg selon les enfants) et l’une ou l’autre des 50 pathologies.

L’étude a ses limites, elle porte sur une période brève (mais le suivi effectué jusqu’à l’âge de 8 ans sur une partie de la population étudiée n’a pas non plus fait apparaitre de risque), et les auteurs reconnaissent qu’elle manque peut-être de puissance pour détecter des variations minimes d’incidence, en particulier pour des pathologies peu fréquentes, que d’autres pathologies pourraient être évoquées, et que ses résultats ne peuvent être étendus à la population adulte. Elle constitue néanmoins une nouvelle pièce rassurante dans un dossier qui n’en manque pas.

Dans un avis publié en 2013, le Haut conseil de la santé publique (HCSP) estimait que rien ne permettait « de remettre en cause la sécurité des vaccins contenant de l’aluminium, au regard de leur balance bénéfices/risques », tout en recommandant de poursuivre les recherches sur la sécurité des adjuvants et en mettant en garde contre toute remise en cause de l’intérêt des vaccins sans justification scientifique (3).

Références

  1. L’aluminium est-il toxique pour le cerveau ?
  2. N.W. Andersson, I.B. Svalgaard et coll. Aluminum-Adsorbed Vaccines and Chronic Diseases in Childhood: A Nationwide Cohort Study.
  3. Aluminium et vaccins. Avis du Haut Conseil de la santé publique, 29/07/2013.