La COVID-19 en Afrique : situation actuelle et interrogations Médecine des voyages

Publié le 15 mar. 2020 à 20h32

Biographie

Médecin retraité, spécialisé en médecine des voyages. Membre de la Société de médecine des voyages (depuis 2000) Formateur en vaccinologie et médecine des voyages (depuis 2000)

Liens d'intérêt

Absence de lien d’intérêt avec les firmes pharmaceutiques

Le 30 janvier 2020, l'Organisation mondiale de la santé a déclaré que l'épidémie de COVID-19 constituait une urgence de santé publique de portée internationale. Le Directeur général de l'OMS a déclaré le 11 mars 2020 que l'épidémie de COVID-19 était une pandémie.

À l'heure où la pandémie de COVID-19 a mis l'Europe sous cloche, l'Afrique, elle, continue le décompte des cas avérés sur son territoire. Il semblerait, selon les médias locaux, qu'il soit recensé de l'ordre de 200 cas de COVID-19 sur le continent dont 5 décès (d'après un bilan de l'AFP).

Vingt quatre pays africains se déclarent en mesure d'effectuer des tests de dépistage de cas potentiels du coronavirus, selon un communiqué du Bureau régional de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), publié le 12 mars.

Vingt deux pays ont déclaré des cas de COVID-19, les premières notifications étant les suivantes : 

  • L'Egypte a déclaré le premier cas africain de COVID-19 le 14 février, sans donner de précisions sur la personne concernée (nationalité, âge, sexe...), qui ne présentait aucun symptôme et a été transférée à l'hôpital puis placé en quarantaine. 
  • En Algérie, les autorités de santé ont notifié un cas confirmé de COVID-19 le 25 février. Il s'agissait d'un importé (Italien arrivé en Algérie le 17 février).
  • Au Nigéria, les autorités ont notifié un cas confirmé de COVID-19 le 27 février dans l'État de Lagos. Il s'agissait là aussi d'un citoyen italien de 44 ans, arrivé d'Italie 48 heures auparavant.
  • Au Cameroun, les autorités ont notifié deux cas confirmés de COVID-19, concernant un citoyen français de 58 ans, arrivé à Yaoundé le 24 février, ainsi que sa partenaire.
  • Au Sénégal, les autorités ont notifié un cas confirmé de COVID-19 chez un Français âgé de 33 ans, entré dans le pays le 26 février après un séjour à Nîmes puis dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, du 13 au 25 février. 
  • En Afrique du Sud, les autorités ont notifié un cas confirmé de COVID-19 le 5 mars chez un homme âgé de 38 ans revenant d'un voyage en Italie avec son épouse.
  • Au Togo un cas confirmé de COVID-19 a été déclaré le 6 mars chez une femme âgée de 42 ans résidant à Lomé. Celle-ci avait séjourné au Bénin, en Allemagne, en France puis en Turquie entre le 22 février et le 2 mars.
  • En Tunisie, les autorités ont notifié un cas confirmé de COVID-19 testés positif le 2 mars chez un quadragénaire de retour d'un voyage en bateau d'Italie. Le patient a développé les symptômes de la maladie deux jours après son arrivée.
  • Au Gabon, un cas confirmé de COVID-19 a été déclaré le 9 mars chez un Gabonais âgé de 27 ans qui avait séjourné en France. Il a regagné le Gabon le 8 mars et a été admis à l'hôpital le 9 mars.
  • En République Démocratique du Congo, les autorités de santé ont notifié un cas confirmé de COVID-19 à Kinshasa le 10 mars. Le patient était un congolais âgé de 52 ans, résident en France et arrivé en RDC le 8 mars.
  • Au Burkina Faso, deux cas confirmés de COVID-19  ont été notifié le 11 mars. Il s'agissait d'un couple dont l'un des membres était rentré fin février de France. Une troisième personne proche du couple est en observation.
  • En Côte d'Ivoire, un cas confirmé de COVID-19 a été déclaré le 11 mars à Abidjan chez un Ivoirien âgé de 45 ans : ce patient, qui présentait une fièvre, une toux et un rhume, avait séjourné auparavant en Italie.
  • En Guinée, un cas confirmé de COVID-19 a été déclaré le 12 mars à Conakry. Cette citoyenne belge était résidente en Guinée depuis octobre 2018, mais elle s'était rendue le 15 février en Belgique, à Bruxelles, pour des vacances, puis en France à Nice du 17 au 21 février, avant de retourner séjourner à Bruxelles du 21 février au 3 mars. 
  • Au Kenya, les autorités ont notifié un cas confirmé de COVID-19 le 13 mars chez un ressortissant kenyan de 27 ans, rentré des États-Unis via Londres le 5 mars.
  • En Ethiopie, un cas confirmé de COVID-19 a été rapporté le 13 mars chez un ressortissant japonais âgé de 48 ans, qui est arrivé en Éthiopie le 4 mars 2020 après un passage par le Burkina Faso. 
  • Au Ghana, deux cas confirmés de COVID-19 ont été déclarés le 13 mars. Les deux personnes guinéennes porteuses du coronavirus revenaient d'un séjour en Norvège pour l'une et en Turquie pour l'autre.
  • Au Soudan, un cas confirmé de COVID-19 a été notifié le 13 mars chez une ressortissante belge employée de la délégation de l'Union européenne dans le pays. La nouvelle a été confirmée par le porte-parole de la délégation. La patiente s'était isolée après s'être sentie malade à son retour d'Europe en Guinée.
  • Au Rwanda, un cas confirmé de COVID-19 a été déclaré le 13 mars chez un ressortissant indien arrivé de Mumbai le 8 mars et symptomatique le 13 mars.
  • En Mauritanie, un cas confirmé de COVID-19 a été notifié le 13 mars à Nouakchott chez un expatrié européen rentré le 9 mars sur le territoire. Le patient s'était mis en quarantaine après avoir appris que son ami en Europe avait été diagnostiqué positif pour la COVID-19.
  • En Guinée Équatoriale, un cas confirmé de COVID-19 a été rapporté à Malabo le 14 mars chez une équato-guinéenne de 42 ans arrivée le 13 mars à Malabo en provenance de Madrid. Elle n'a montré aucun symptôme suspect, mais a été testée positive pour la COVID-19 lors du contrôle des passagers.
  • En Namibie, deux cas de COVID-19 ont été confirmés le 14 mars chez un couple de touristes espagnols qui voyageaient dans le pays.
  • Au Swaziland, un cas confirmé de COVID-19 a été rapporté à Mbabane le 14 mars chez une femme récemment entrée dans le pays le 6 février, après avoir voyagé en chine et en Afrique du Sud. Elle est actuellement placée en quarantaine à l'hôpital de Mbabane.

La quasi-totalité des cas détectés en Afrique sont des cas d'importation, principalement en raison des mouvements de personnes entre les zones où le SARS-CoV-2 circule et l'Afrique. l'évolution épidémiologique de l'introduction de ces cas importés est difficile à préciser.

Selon l'European Centre for Disease Prevention, au 15 mars 2020 les pays ayant déclaré des cas sont les suivants : Egypte (93 cas), Algérie (37cas), Afrique du Sud (24 cas), Sénégal (21 cas), Maroc (18 cas), Tunisie (16 cas), Côte D'Ivoire (4 cas), Burkina Faso (3 cas), Cameroun (3 cas), République Démocratique du Congo (2 cas), Ghana (2 cas), Namibie (2 cas), Nigeria (2 cas), Guinée Equatoriale (1 cas), Ethiopie (1 cas), Gabon (1 cas), Guinée (1 cas), Kenya (1 cas), Mauritanie (1 cas), Rwanda (1 cas), Soudan (1 cas), Swaziland (1 cas) et Togo (1 cas).

L'augmentation faible du nombre de cas de COVID-19 détectés sur le continent africain interroge les experts. Toutes les personnes dont l'infection par le virus MERS-CoV-19 a été officiellement confirmée en Afrique seraient des cas importés. Peu de personnes recensées par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) dans plus de 60 pays sont africaines. 

Dès l'apparition du virus en Chine, l'Afrique a été pointée du doigt comme le plus grand foyer à risque de propagation de la maladie. Les experts fondaient leur hypothèse sur ses liens commerciaux avec la Chine et la faiblesse des infrastructures médicales en Afrique. 

Pourtant, malgré de nombreuses alertes, l'épidémie ne semble pas jusque-là se développer sur le seul continent où les écoles et les universités sont toujours ouvertes. 

Les épidémiologistes se perdent en conjectures. Certains pays africains n'ont pas rapatrié leurs étudiants. 

On avance la piste d'une possible protection climatique, sans aucune preuve scientifique pour l'instant.  

Une autre hypothèse s'appuie sur la présence du paludisme en Afrique, qui pourrait offrir à ses populations une protection génétique contre ce type de virus. Quant au rôle de la chloroquine (Nivaquine), efficace en laboratoire contre le MERS-CoV-19, aucune étude n'a pu venir valider cette supposition.

D'autres experts attribuent le faible nombre de cas confirmés de contamination au coronavirus à de possibles ratés des systèmes de détection signalés en Afrique. Mais il est peu probable que les pays africains aient été en mesure d'identifier des cas importés ponctuels tout en passant à côté d'une épidémie et de cas graves (NDLR).

Sources : Promed ; European Centre for Disease Prevention ; Organisation mondiale de la santé ; Ministère de la santé des pays concernés ; Médias locaux.