La progression de la protection vaccinale contre la covid 19 permettra-t-elle prochainement d'assouplir les recommandations ?

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Dans quelques pays, l'évolution favorable de l'épidémie de covid 19, en lien avec la protection apportée par une large couverture vaccinale, a permis aux autorités de lever une partie des mesures prises pour s'opposer à la transmission du virus, dont les conséquences sociétales et économiques sont partout considérables. Ainsi, Israël, le Royaume-Uni et l'Italie ont pu récemment autoriser la reprise de certaines activités et rendre quelques libertés à leurs citoyens.

La vaccination progresse en France. Selon CovidTracker, le 26 avril 2021, 14 102 290 personnes, soit 21,05 % de la population nationale, avaient reçu une première dose de vaccin, et 5 741 972, soit 8,57 %, avaient reçu les deux doses. Alors que la campagne est appelée à s'accélérer, avec notamment l'utilisation du vaccin Janssen COVID-19 Vaccine en dose unique, et pourrait permettre d'atteindre un niveau d'immunité collective suffisant pour enrayer la circulation du SARS-CoV-2, le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) s'est penché sur les adaptations des recommandations en vigueur qui pourraient découler de cette évolution (avis du 11 avril 2021). Il répondait à une saisine adressée le 26 mars par la Direction Générale de la Santé (DGS).

Dans son communiqué du 25 avril, le HCSP revendique une attitude de prudence et d'espoir, qu'il justifie :

  • d'une part, par une situation épidémiologique nationale jugée encore défavorable, marquée par la saturation des hôpitaux, par les incertitudes qui persistent quant à la protection conférée par les vaccins contre le portage et la transmission du virus, particulièrement des nouveaux variants d'intérêt, et par la couverture vaccinale encore faible,
  • d'autre part, par l'efficacité établie des vaccins contre les formes graves de covid 19, celle des mesures barrières en vigueur, et par l'intensification de la campagne vaccinale.

Concernant les effets des vaccins, le HCSP a examiné les résultats de nombreuses études disponibles, menées chez l'animal et chez l'Homme avec les différents vaccins, et qui se sont intéressées à plusieurs effets : protection contre les formes graves et symptomatiques, diminution de la présence de virus au niveau des voies respiratoires, efficacité contre les variants. Il considère que "les essais randomisés analysés montrent que les vaccins actuellement autorisés en France présentent une efficacité vaccinale élevée sur les formes graves du Covid-19 mais les données sur leur efficacité sur les formes asymptomatiques et donc sur la transmission, ne sont pas démontrées". La durée de l'immunité conférée reste par ailleurs indéterminée. Des modélisations de l'efficacité vaccinale en fonction du niveau de couverture et du taux de reproduction virale (R0) ont également été prises en compte, les conséquences de la diffusion de variants aux propriétés encore mal identifiées restant à analyser.

Dans ce contexte, Le HCSP recommande d’une manière générale :

  • de poursuivre l’application des mesures barrières en cette période, même en étant vacciné ;
  • de promouvoir et de faciliter l’accès à la vaccination de toutes les personnes ;
  • d’engager des campagnes de communication pédagogique à destination des citoyens vaccinés pour leur expliquer l’importance des mesures barrières, même en étant vaccinés.
  • d’utiliser des relais de communication au plus près des personnes dans tous les milieux sociaux ;
  • d’évaluer l’impact psycho-social, socio-économique et sanitaire de l’application prolongée des mesures barrières dans toutes les tranches d’âge et les milieux sociaux ;
  • de promouvoir des études de suivis cliniques et microbiologiques des personnes ayant bénéficié d’un schéma vaccinal pour évaluer le risque individuel d’infection par exposition à des personnes infectées ainsi que le risque de transmission en tenant compte des différents variants d’intérêt ;
  • de promouvoir la réalisation de travaux de modélisation permettant d’évaluer le risque de transmission en fonction de la levée de telle ou telle mesure barrière ;
  • de réévaluer les conduites à tenir en fonction de l’évolution épidémiologique du Covid-19, notamment la proportion de variants préoccupants.

Pour les personnes ayant reçu une vaccination complète, il est recommandé :

  • de poursuivre leur inclusion dans la politique de "contact tracing" ;
  • de considérer qu'elles restent définies comme des contacts à risque, même si ce risque est probablement diminué ;
  • dans un cadre privé familial ou amical en milieu intérieur fermé :
    • que toutes les personnes réunies puissent ne pas porter de masque si elles ont toutes bénéficié d’un schéma vaccinal complet et à condition de respecter les autres mesures barrières : hygiène des mains, distance interindividuelle, aération et limitation à 6 du nombre de personnes. Cette recommandation ne s’applique pas, dès lors que l’un des membres présente un facteur de risque de formes graves (âge, comorbidité).
    • que toutes les personnes réunies continuent de respecter l’ensemble des mesures barrières y compris le port de masque lorsque l’une d’elles n’a pas bénéficié d’un protocole de vaccination complet.
  • dans un cadre collectif en population générale (collectivités et milieux extérieurs ouverts)
    • de continuer à respecter l’application des mesures barrières dont le port de masque et la limitation des déplacements, en accord avec l’évolution des décisions nationales et en fonction de l’avancée de la couverture vaccinale.
    • de ne pas participer ni organiser des regroupements de personnes au-delà de ce qui est réglementairement autorisé.

Ces recommandations ne proposent qu'un allègement modéré des mesures en vigueur, applicable au seul cadre privé, familial ou amical. Elles visent surtout à amplifier les études et mesures susceptibles d'améliorer nos connaissances et d'impacter significativement la dynamique de l'épidémie, des progrès restant nécessaires pour envisager d'aller plus avant dans la levée des contraintes.
A la demande de la DGS, l'avis du HCSP ne s'adresse pas aux personnes vaccinées qui fréquentent ou travaillent dans un établissement recevant du public ou dans des établissements sociaux et médico-sociaux. De même, les réflexions menées à différents niveaux sur un éventuel "passeport vaccinal" n'ont pas été prises en compte.

Elaboré le 11 avril 2021 et publié le 25 avril, l'avis du HCSP est déjà "daté". Il prend par exemple en compte un effectif de 9 561 733 personnes ayant reçu une première dose de vaccin, effectif qui a augmenté de près de 5 millions depuis. Un variant viral indien récemment décrit suscite des interrogations nouvelles. Ce jour, 27 avril, les médias nationaux ont fait état de la mise en expérimentation d'un "pass sanitaire" pour les passagers des avions à destination de la Corse ayant un test RT-PCR négatif. Cette utilisation devrait rapidement s'étendre à d'autres destinations, et selon le ministre délégué des Transports, elle pourrait être développée pour concerner à l'avenir les personnes sans symptômes, immunisées par une infection ou vaccinées. Toutefois, le "pass" n'est pas a priori destiné à servir dans les activités du quotidien, comme aller au restaurant ou dans les magasins.

Plusieurs facteurs sont donc susceptibles de justifier une évolution prochaine des recommandations de nos autorités.

Référence

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