Situation de la fièvre jaune en Afrique et en Amérique centrale et du Sud

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Un point de situation de la fièvre jaune en Afrique et en Amérique centrale et du Sud pour les années 2008 et 2009 a été récemment publié par l'Organisation mondiale de la santé (OMS).

1. Introduction

En 2008, 149 cas confirmés en laboratoire de fièvre jaune, dont 58 décès, ont été notifiés à l’OMS ; en 2009, 75 cas confirmés en laboratoire, dont 21 décès, ont été signalés.

En 2008, 16 flambées de fièvre jaune ont été notifiées dans 13 pays. La Côte d’Ivoire et le Paraguay ont signalé des flambées dans les zones urbaines entourant leur capitale.

En 2009, le nombre de flambées notifiées est descendu à 11. La République centrafricaine, la Côte d’Ivoire et la Guinée ont été atteintes par plusieurs flambées au cours de la période 2008-2009, ce qui reflète l’intense circulation du virus à travers les parties occidentales et centrales de l’Afrique. Dans ce continent, la République centrafricaine a notifié plusieurs événements de type flambée en 2008 et 2009. Un événement est défini par l'apparition d’un groupe d’un ou plusieurs cas confirmés en laboratoire et d’autres cas associés aux cas présumés. Ce terme est utilisé pour caractériser le risque de flambée, dans la mesure où, généralement, le nombre de cas est sous-estimé et où, derrière un cas unique, se cache souvent un groupe de cas non diagnostiqués. Un protocole spécial d’évaluation des risques a été mis au point dans ce domaine afin de mesurer la circulation du virus de la fièvre jaune à l’échelle nationale chez l’homme, les primates non humains et les vecteurs.

Depuis octobre 2008, la Région OMS des Amériques a enregistré une intensification de la circulation du virus de la fièvre jaune sylvatique, qui atteignait l’Argentine et le Brésil dans la partie méridionale du continent, la République bolivarienne du Venezuela et la Colombie dans la Région andine, ainsi que Trinité-et-Tobago dans les Caraïbes. Une épizootie de grande ampleur a été signalée en Argentine, en République bolivarienne du Venezuela, au Brésil et à Trinité-et-Tobago en 2008.

2. Risque pour les voyageurs

La fièvre jaune représente un problème de santé publique majeur dans de grandes partiesde l’Afrique, de l’Amérique centrale et de l’Amérique du Sud. Des millions de voyageurs se rendent dans des zones où le virus amaril est présent et sont exposés au risque d’infection. Aucun traitement spécifique n’est disponible et, dans les zones de forêt, la lutte contre les moustiques sauvages pour prévenir les infections sylvatiques n’est pas praticable.

Pour les individus non vaccinés pénétrant dans une zone d’activité épidémique en Afrique, le risque de contracter la fièvre jaune au cours d’un séjour de deux semaines a été estimé à 1/2 767 personnes non vaccinées et le risque de décès associé à 1/1 333. Ce risque varie considérablement en fonction de la saison. Les chiffres correspondants pour l’Amérique du Sud sont probablement 10 fois inférieurs.

3. Région africaine

En 2008, 47 cas de fièvre jaune, dont 6 décès, ont été notifiés par la Région africaine de l’OMS, soit une létalité de 12,8 %. En 2009, 20 cas et 3 décès ont été notifiés, ce qui amène la létalité à 15,0 %. En 2008, la Côte d’Ivoire a notifié des cas urbains dans plusieurs districts sanitaires de sa capitale, Abidjan. Malgré la campagne de vaccination de masse menée en 2001, la couverture vaccinale a été évaluée à moins de 60 %. Le nombre de cas notifiés ne reflète habituellement que le nombre de cas confirmés par des examens de laboratoire et non le nombre total de cas apparus. Les pays principalement concernés sont le Burkina Faso, le Cameroun, la République Centrafricaine, le Tchad, la Côte d'Ivoire, la République Démocratique du Congo, la Guinée, le Liberia et le Sierra Leone.

Burkina Faso

En octobre 2008, le système de surveillance épidémiologique en place au Burkina Faso a détecté deux cas présumés de fièvre jaune dans le district sanitaire d’Ouahigouya, dans la partie septentrionale du pays, limitrophe de la partie sud du Mali. Ces deux cas ont été confirmés par des examens de laboratoire. Le premier concernait un garçon de 7 mois originaire du village de Bossawassa, qui, entre autres signes cliniques, présentait un ictère fébrile. Le second cas était un garçon de 6 ans vivant dans le village de Bouad-Kouli. Ces deux villages étaient contigus. A titre préventif, une campagne de vaccination de masse a été menée à l’intention de 366 052 personnes. La couverture administrative était de 95 %.

Cameroun

En octobre 2008, le système de surveillance épidémiologique du Cameroun a détecté deux cas présumés, confirmés l’un et l’autre ultérieurement par des examens de laboratoire, dans les districts sanitaires d’Abong Mbang et de Nguélémendouka, situés dans la région orientale de ce pays. Le premier cas était un homme de 28 ans non vacciné. Il a été hospitalisé à l’hôpital de district d’Abong Mbang, où il est décédé quelques jours plus tard dans un tableau de défaillance polyviscérale. Le second cas était un homme de 45 ans non vacciné. Il a présenté un ictère fébrile et une hémorragie gastro-intestinale. Il est également décédé. Une équipe chargée d’investiguer la flambée n’a relevé aucun autre cas. Le Ministère de la santé a décidé de vacciner les habitants de ces deux districts sanitaires et environ 125 000 personnes avaient reçu le vaccin au début de l’année 2009. La couverture administrative était de 92,1 %.

En mai 2009, le Cameroun a procédé à une campagne nationale de vaccination préventive dans 62 districts considérés comme à haut risque d’épidémie en raison de la survenue de flambées dans d’autres zones du pays. Le 8 septembre 2009, le Cameroun a notifié un autre cas confirmé au laboratoire. Il s’agissait d’un homme de 61 ans qui présentait un ictère fébrile et des douleurs dorsales. Il provenait de Kotto 1, dans le village de Bomboko (district sanitaire de Buea, Province du Sud-Ouest). Le district sanitaire de Buea n’était pas connu comme étant endémique pour la fièvre jaune. En réponse, une campagne de vaccination de masse a été menée dans le district de Buea et celui de Mbongue (un district voisin considéré comme à risque), à l’intention d’une population de 165 138 personnes. La couverture administrative était de 102,5 %.

République Centrafricaine

En 2008, la République Centrafricaine a notifié trois événements de type flambée. Le premier a été signalé en avril 2008 dans la sous-préfecture de Bozoum, dépendant de la préfecture d’Ouham-Pendé. Le cas, un homme de 55 ans, avait été repéré par le système de surveillance épidémiologique. Il présentait un ictère fébrile. La présence de la fièvre jaune a été confirmée par des examens de laboratoire. Une équipe chargée d’investiguer la flambée a collecté 39 échantillons de sérum chez des contacts symptomatiques et asymptomatiques du cas indicateur. Un seul échantillon supplémentaire a été confirmé positif pour l’immunoglobuline M antiamarile (IgM) par un titrage immuno-enzymatique (ELISA). En réponse à cette flambée, une campagne de vaccination de masse a été menée dans la sous-préfecture de Bozoum à l’intention de 55 035 personnes. La couverture rapporté était de 92 %.

Le second événement de type flambée a été notifié en août 2008 dans la sous-préfecture de Boda (préfecture de La Lobaye). Il a été détecté par le système de surveillance épidémiologique. Le cas indicateur était un homme de 32 ans. Une équipe d’investigation s’est rendue dans la sous-préfecture et a collecté 35 échantillons de sérum chez des membres symptomatiques et asymptomatiques des foyers voisins et chez le cas indicateur. Les 34 cas présumés se sont tous révélés négatifs pour les IgM antiamariles (anticorps témoignant d'une infection récente par le virus de la fièvre jaune) après application d’un test immunoenzymatique appelé test ELISA. Une campagne de vaccination de masse préventive a été organisée dans 5 sous-préfectures (quatre dans la préfecture de La Lobaye et une dans la préfecture voisine de La Sangha) à l’intention de 183 992 personnes. La couverture rapportée était de 78,4 %.

La troisième flambée a été notifiée en décembre 2008. Elle s’est déclarée simultanément en deux endroits : dans la sous-préfecture de Bimbo, dépendant de la préfecture d’Ombella-Mpoko, au Sud du pays et dans la sous-préfecture de Bria (préfecture de Haute Kotto), située au Nord du pays. Dans la sous-préfecture de Bimbo, le cas indicateur était une femme de 38 ans, repérée par le système de surveillance épidémiologique le 18 octobre. Ce cas a été confirmé par des examens en laboratoire au niveau national et régional. Le Ministère de la santé a décidé de vacciner des habitants des zones géographiques de Boali et Damarra, deux districts de la préfecture d’Ombella-Mpoko, en visant 201 608 personnes. La couverture rapportée était de 94,7 %. S’agissant de la sous-préfecture de Bria, le cas indicateur était un homme de 31 ans, présentant un ictère fébrile et repéré le 24 octobre 2008. Ce cas a été confirmé par des examens de laboratoire. Le Ministère de la santé a décidé de vacciner des habitants des zones géographiques de Bria, d’Ouadda et de Yalinga, trois districts de la préfecture de Haute Kotto, en ciblant 297 127 personnes. La couverture rapportée était de 76 %.

En novembre 2009, la République centrafricaine a notifié quatre cas confirmés en laboratoire, dont trois décès, dans la sous-préfecture de Yaloké-Bossembelle (préfecture d’Ombella-Mpoko) et dans la sous-préfecture de Bagamongone (préfecture de La Lobaye). Le cas indicateur a été signalé dans la sous-préfecture de Yaloké-Bossembelle. Il s’agissait d’un éleveur de bétail de 18 ans. Au cours de l’investigation, des échantillons de sérum ont été recueillis chez 80 contacts du cas indicateur ; tous se sont révélés négatifs (absence d'IgM antiamariles). Des études entomologiques ont mis en évidence la présence limitée de moustiques vecteurs de la fièvre jaune sylvatique. Une campagne de vaccination réactive a été menée à l’intention de 327 877 personnes. La couverture rapportée était de 85,4 %.

Ces événements se sont produits dans un pays où la dernière notification de flambée remontait à 24 ans, de sorte qu’il a été décidé d’examiner s’il y avait eu une intensification de la circulation du virus amaril chez l’homme, les primates non humains ou les moustiques. Cette enquête a débouché sur les conclusions suivantes : (i) le risque d’épidémie est plus important à Bangui, la capitale (compte tenu des vecteurs présents, de la proportion de la population non vaccinée et de la circulation du virus) ; (ii) les zones écologiques situées au sud du pays sont à haut risque d’épidémie ; (iii) le risque pour les zones écologiques du nord du pays est faible, mais il existe des éléments prouvant la circulation du virus et un certain nombre d’infections se sont déclarées récemment ; (iv) la fièvre jaune est endémique dans le pays et il existe un risque d’épidémie, notamment dans les zones urbaines.

Tchad

En mai 2009, un cas présumé a été notifié par le système de surveillance épidémiologique dans le district d’Iriba appartenant à la Région de Wadi Fira, une zone exposée à de graves problèmes de sécurité et abritant des réfugiés venus du Soudan. Une équipe chargée d’investigation a évalué la situation et signalé 2 autres cas présumés, qui n’ont pas été confirmés en laboratoire. Le Tchad a mis en œuvre des campagnes de vaccination antiamarile sur la période 1930-1950 et aucun cas n’a été notifié depuis.

Côte d’Ivoire

En mai 2008, le Ministère de la santé a déclaré qu’il y avait eu une flambée de fièvre jaune urbaine à Abidjan. Une mission a été déployée par le Réseau mondial OMS d’alerte et d’action en cas d’épidémie pour évaluer la situation épidémiologique et entomologique et pour investiguer les risques de flambée urbaine à grande échelle. Deux cas ont été confirmés dans deux districts sanitaires distincts de la capitale. Il s’agissait pour l’un d’une femme de 48 ans originaire du quartier de Cocody, à Abdijan. Cette femme avait été vaccinée en 1997. Le second cas était un homme de 20 ans issu de la zone urbaine de Treichville à Abidjan ; il n’avait jamais été vacciné contre la fièvre jaune.

La mission est parvenue aux conclusions suivantes :

  • sur le plan épidémiologique, on observait un regroupement temporel de cas sans focalisation géographique et sans suite ;
  • malgré la campagne de vaccination de masse menée en 2001, la couverture vaccinale réelle était probablement inférieure à 60 %;
  • des vecteurs capables de transmettre la fièvre jaune étaient présents à Abidjan ;
  • les indices de risque entomologique (indice de Breteau et indice récipient) étaient supérieurs aux seuils dans toutes les localités où des investigations avaient été menées, ce qui indiquait un risque élevé de transmission.

Sur la base de ces résultats, le Ministère de la santé a décidé de procéder en août 2008 à une campagne de vaccination à Abidjan visant 1 938 161 personnes. La couverture administrative était de 105,1%.

En novembre 2009, la Côte d’Ivoire a signalé 10 cas présumés et 6 décès dans les districts sanitaires de Minignan et Madinani appartenant à la région du Denguele. Le cas indicateur était un collégien de 12 ans non vacciné du district de Minignan. Deux autres cas ont été signalés dans le district de Madinani. A l’issue d’une investigation, trois cas seulement ont été confirmés par des examens faisant appel à l’amplification génique (détection du génome du virus de la fièvre jaune par une technique appelée PCR) dans le laboratoire régional de référence.

Après des investigations supplémentaires, le Ministère de la santé a vacciné 154 941 personnes dans les districts sanitaires de Madinani et Minignan. Le taux de couverture administrative était de 87,4%.

République démocratique du Congo

En avril 2009, la République démocratique du Congo a notifié un cas. Il s’agissait d’un agriculteur de 55 ans vivant dans le district de Mbama (département Cuvette-Ouest). Ce cas a d’abord présenté des douleurs abdominales aiguës, puis un ictère fébrile. Une équipe d’investigation a évalué la situation dans le district, sans qu’aucun cas supplémentaire ne soit détecté. La vaccination visait 74 697 de personnes et la couverture rapportée a été de 71,5 %. Le pays avait procédé à des campagnes de vaccination de masse pendant la période 1930-1960. La dernière flambée notifiée s’était produite en 1981, après quoi aucun cas de fièvre jaune n’a été confirmé jusqu’en 2009.

Guinée

En septembre 2008, le Ministère de la santé a signalé deux cas confirmés en laboratoire dans la préfecture de N’zérékoré. Le premier cas concernait un homme de 24 ans vivant dans la sous-préfecture de Bounouma. Le second était un homme du même âge habitant la commune urbaine de N’zérékoré. Aucun de ces deux cas n’était vacciné. Une équipe d’investigation s’est rendue dans 10 sous-préfectures et dans la commune urbaine de N’zérékoré, ainsi que dans deux sous-préfectures de la préfecture de Lola. La mission est parvenue aux conclusions suivantes :

  • 14 cas présumés ont pu être identifiés rétrospectivement grâce à la définition de cas et l’un de ces cas présumés était mort après avoir présenté un ictère fébrile ;
  • la plupart des préfectures avaient vacciné leur population en 2005 et une couverture de 95,2 % avait été rapportée ;
  • les seules zones dans lesquelles une faible couverture était signalée étaient la sous-préfecture de Bounama, la commune urbaine et le camp de réfugiés ivoiriens de Kouankan II.

Le Ministère de la santé a procédé à une campagne de vaccination réactive dans trois zones à l’intention de 140 342 personnes. La couverture administrative rapporté était de 101 %.

En décembre 2008, la Guinée a notifié deux cas confirmés en laboratoire dans le district sanitaire de Faranah. Ces deux cas présentaient un ictère fébrile et ont été signalés par le système de surveillance. Le cas indicateur était un homme de 40 ans originaire de Faranah Koura ; le second cas était un autre homme de 40 ans issu du secteur de Nianfourando, ces deux localités faisant partie de la zone centrale de Faranah. Vingt-et-un cas présumés supplémentaires ont été signalés, parmi lesquels trois décès. Une campagne de vaccination réactive a visé 60 485 personnes; la couverture n’a pas été rapportée.

En janvier 2009, la Guinée a signalé un cas présumé de fièvre jaune dans la préfecture de Mandiana (Région de Kankan). Il s’agissait d’une femme de 35 ans originaire du village de Malikila qui présentait un ictère fébrile. Par la suite, on a également identifié deux cas confirmés en laboratoire et 6 cas présumés. Une campagne de vaccination réactive a été menée dans 12 sous-préfectures à l’intention de 290 292 personnes ; selon une enquête, la couverture a été de 94,8 %. Parmi les 25 préfectures du pays, celle de Mandiana était considérée comme étant la plus exposée au risque de fièvre jaune.

Libéria

En avril 2008, deux cas de fièvre jaune confirmés en laboratoire on été notifiés, dont un décès, dans le district de Tappita (comté de Nimba). Le cas indicateur était un homme de 32 ans qui n’a pas survécu. En réponse à cette flambée, une campagne de vaccination de masse a été menée dans la zone touchée et dans les districts environnants, à l’intention de 294 613 personnes. La couverture administrative était de 99 %.

En avril 2009, le Libéria a notifié un cas confirmé en laboratoire dans la ville de Luyeama (district de Zorzor). Ce cas a été identifié grâce à la surveillance régulière de la fièvre jaune dans le comté de Lofa. Il s’agissait d’un homme de 32 ans présentant un ictère fébrile. Au cours de l’investigation de cette flambée, 9 échantillons de sérum ont été prélevés chez des cas présumés et des contacts, sans qu’aucun cas supplémentaire ne soit identifié. Une campagne réactive a été organisée dans les districts de Voinjama et Zorzor, à l’intention de 96 169 personnes. La couverture administrative a été de 99,7 %.

Sierra Leone

En décembre 2008, le Ministère de la santé a notifié deux cas confirmés en laboratoire dans les communautés de Gerihun et Jembe (district de Bo). Ces deux cas ont été signalés par le système de surveillance ; ils présentaient tous les deux un ictère fébrile. Dans le cadre des investigations concernant cette flambée, 7 autres cas cliniques présumés ont été identifiés, mais aucun d’entre eux n’a été confirmé par les examens en laboratoire. Une campagne de vaccination réactive, visant 527 978 personnes, a été menée dans le district de Bo. La couverture administrative était de 84 %.

En 2008, dans la Région africaine, 10 campagnes de vaccination réactives ont visé quatre millions de personnes ; en 2009, 6 campagnes de vaccination réactives ont été menées à l’intention de 1,1 million de personnes.

Évaluation des risques et campagnes préventives en Afrique de l’Ouest

Entre 2006 et 2009, 10 pays d’Afrique de l’Ouest ont bénéficié d’une évaluation du risque de fièvre jaune. Des recherches entomologiques pouvaient être menées si cela se justifiait. Les modèles employés pour l’évaluation du risque tenaient compte de la vulnérabilité de la population aux maladies à transmission vectorielle et donnaient un aperçu de la dynamique de la maladie et du risque d’épidémie.

L’analyse des risques est un processus en deux étapes comprenant en premier lieu la modélisation de l’exposition et des indicateurs de sensibilité dans les zones rurales et urbaines, et deuxièmement, l’intégration d’informations provenant des parties prenantes locales aux résultats de la modélisation. Cette analyse est affinée par la prise en compte de facteurs qui ne peuvent être traités par la modélisation mathématique, tels que les schémas de migration des populations nomades.

En Afrique de l’Ouest, durant l’année 2008, deux campagnes de vaccination préventive ont été organisées au Burkina Faso et au Mali à l’intention de 13,5 millions de personnes. En 2009, quatre campagnes de vaccination préventive ont été mises sur pied au Bénin, au Cameroun, au Libéria et au Sierra Leone, en vue de vacciner 20,8 millions d’individus.

4. Région des Amériques

En 2008, 102 cas de fièvre jaune, parmi lesquels 52 décès, ont été notifiés par l’Argentine, la Bolivie, le Brésil, la Colombie, le Paraguay et le Pérou, avec une létalité de 51 %. En 2009,55 cas, dont 18 décès, ont été signalés par ces mêmes pays ; la létalité était de 32,7 %.

En 2008, des cas ont été identifiés en zone urbaine à Asunción, au Paraguay. Il s’agissait des premiers cas signalés en milieu urbain dans la Région des Amériques depuis 1954, année marquée par le signalement d’un cas de fièvre jaune urbaine par Trinité-et-Tobago. Avant cela, la dernière flambée de fièvre jaune urbaine avait été notifiée par le Brésil en 1942.

La surveillance épidémiologique s’est intensifiée dans la Région des Amériques. L’Argentine, le Brésil, le Paraguay et la République bolivarienne du Venezuela, exercent une surveillance des décès dus à la fièvre jaune chez les primates non humains, en plus de la surveillance de la fièvre ictéro-hémorragique. Le renforcement de cette surveillance a contribué à la détection précoce du virus circulant et à la redéfinition des zones enzootiques sur le continent.

Argentine

Entre février et mars 2008, 8 cas humains, dont un décès, ont été confirmés par des examens de laboratoire et notifiés par la Province de Misiones. Quatre de ces cas, y compris celui décédé, sont apparus dans le département de Guarani. Les quatre cas restants ont été diagnostiqués dans les départements de San Pedro (2), d’Eldorado (1) et du General Belgrano (1). En décembre 2008, un autre cas mortel, confirmé par des examens de laboratoire, a été signalé par le département de La Capital, dans la province de Misiones. Cette flambée a été le premier événement lié à la fièvre jaune notifié par le pays depuis 1966.

Parmi ces 9 cas, 8 (89 %) étaient des hommes et l’âge des cas se situait entre 16 et 61 ans. Tous les cas avaient travaillé dans des zones rurales. Aucun d’entre eux n’avait été vacciné.

Au début du mois de janvier 2008, plusieurs singes morts ont été signalés dans les départements d’Apostoles, Capital y Concepción, Guaraní et San Pedro, tous situés dans la Province de Misiones. Aucun cas n’a été signalé en 2009.

État plurinational de Bolivie

Dans l’État plurinational de Bolivie, un seul cas confirmé en laboratoire a été notifié en 2008 ; il s’agissait d’un ouvrier agricole de 19 ans non vacciné, qui a survécu. Il est probable que l’infection s’était produite dans la municipalité de Palos Blancos, située dans la partie tropicale du département de La Paz. Aucun cas n’a été notifié en 2009.

Brésil

En 2008, le Brésil a notifié au total 46 cas confirmés dont 27 décès (soit une létalité de 58,7 %). Parmi ces cas, 43 faisaient partie d’une flambée généralisée ayant impliqué 7 Etats des régions centrales et méridionales du pays, et ayant persisté tout au long de l’année. Les trois premiers cas ont été détectés à la fin du mois de décembre 2007. La flambée s’est poursuivie en 2008, avec la notification par le pays de 43 cas supplémentaires dans les États du Distrito Federal (5), de Goiás (17), de Minas Gerais (1), du Mato Grosso (2), du Mato Grosso do Sul (9), de Parana (2), du Rio Grande Do Sul (5) et de São Paulo (2).Il y a eu 25 décès parmi les 43 cas notifiés lors de cette flambée, soit une létalité de 58 %. Deux cas ont été confirmés par l’établissement d’un lien épidémiologique ; les 41 cas restants ont été confirmés par des examens de laboratoire. La majorité des cas étaient des hommes non vaccinés (âge médian : 38 ans) qui avaient été exposés au cycle sylvatique du virus. Parmi les 41 cas confirmés par les examens biologiques, 10 (23 %) étaient des femmes et 5 (12 %) avait été vaccinés. Le dernier cas est apparu à la fin du mois de mai 2008.

Trois cas supplémentaires, sans relation avec la flambée et sans lien épidémiologique avec un autre cas, ont été notifiés par l’État de Para. L’un est apparu en février 2008 et les deux autres en juin de la même année.

En 2009, 43 cas, dont 15 décès, ont été notifiés dans les Etats de São Paulo et du Rio Grande do Sul. Dans l’État de São Paulo, 27 cas confirmés en laboratoire ont été signalés de février à avril 2009 ; 10 de ces cas sont décédés (soit une létalité de 37 %). Parmi les 27 cas confirmés, 17 (63 %) étaient des hommes. L’âge des cas variait de 8 jours à 52 ans (âge médian : 29 ans) ; aucun de ces cas n’avait été vacciné et tous participaient à des activités ou vivaient en milieu rural. Les notifications émanaient des municipalités suivantes : Buri, Italinga, Piraju, Sarutaià et Tejupa.

Dans l’État du Rio Grande do Sul, 13 cas ont été notifiés (11 confirmés par des examens de laboratoire; 2 cas présumés et épidémiologiquement liés). Parmi ces 13 cases, trois n’ont pas survécu (létalité de 23 %) ; 11 cas (84,6 %) étaient des hommes. Les notifications de cas émanaient des municipalités suivantes : Espumoso, Ijuí, Santo Angelo, Santa Cruz do Sul, Vera Cruz et Vale Verde.

Au cours de l’année 2008, le virus a circulé chez les primates non humains dans les régions du centre et du Sud-Est du pays, circulation qui a été suivie d’une flambée de fièvre jaune sylvatique durant la période 2008-2009.

Colombie

En 2008, la Colombie a notifié trois cas confirmés en laboratoire, qui sont tous décédés. Ces cas sont apparus dans les départements de Guaviare et Meta. Le premier concernait un homme de 52 ansnon vacciné, qui s’était rendu dans la municipalité d’El Retorno (département de Guaviare). Le second cas était une femme au foyer de 21 ans, qui vivait à Puerto Gaitan et n’avait pas été vaccinée. Le dernier cas a été identifié dans la municipalité de Puerto Concordia ; il s’agissait d’un agriculteur de 24 ans dont le statut vaccinal était inconnu.

En 2009, 5 cas humains confirmés en laboratoire ont été notifiés. Leur infection était probablement survenue dans le département de Meta : quatre dans la municipalité de La Macarena et un dans la municipalité de Puerto Concordia. Deux de ces cas sont décédés : il s’agissait pour l’un d’un touriste autochtone et pour l’autre d’un agriculteur. Parmi ces 5 cas, quatre (80 %) étaient des hommes. Leur âge allait de 17 à 55 ans. Un cas avait été vacciné en 2004 ; il présentait des symptômes bénins et s’est complètement rétabli par la suite. Dans le cas de l’individu vacciné, les examens de laboratoire étaient négatifs pour les IgM, mais positifs pour la PCR. Le statut vaccinal de deux des cas était inconnu et deux cas n’avaient pas été vaccinés.

Paraguay

En janvier 2008, un cas présumé de fièvre jaune a été admis à l’hôpital de l’Etat de San Pedro. Ce cas a été confirmé plus tard par des examens de laboratoire. Le malade avait pris part à une partie de chasse avec 6 personnes dans une zone de jungle dépendant de la municipalité voisine de San Estanislao. Parmi ses compagnons de chasse, trois ont également présenté des symptômes compatibles avec la fièvre jaune dont le diagnostic a été confirmé. C’était la première flambée de fièvre jaune identifiée au Paraguay depuis 1974.

A la fin du mois de mai 2008, 28 autres cas confirmés en laboratoire ont été enregistrés. Au cours de l’année 2008, des cas ont été signalés par les départements de San Pedro (15), Central (9) and Caaguazu (4) ; leur identification résulte d’une surveillance intensive, couvrant l’ensemble du pays. Il y a eu 11 décès parmi les 28 cas de 2008 (soit une létalité de 39,3 %). Au total, 17 (80 %) de ces cas étaient des hommes. L’âge médian des cas était de 26 ans. Leurs principales activités étaient l’agriculture et la chasse.

Les 9 cas identifiés dans le département central étaient tous des résidents de Laurelty, un quartier urbain faisant partie de la zone métropolitaine d’Asunción, capitale du Paraguay. Cinq cas (56 %) étaient des femmes. L’âge des cas se situait entre 11 et 39 ans. Tous les cas travaillaient dans la zone métropolitaine d’Asunción et aucun n’avait effectué récemment de déplacement en dehors de sa zone de résidence. Leurs foyers se situaient à moins de 500 mètres les uns des autres. Parmi ce groupe de cas, trois sont décédés (létalité de 33,3 %).

Une enquête entomologique, effectuée en janvier, a indiqué que le taux d’infestation des ménages par Aedes aegypti(le moustique qui transmet la fièvre jaune) était de 13 %. Elle n’a pas repéré de moustique sylvatique et les résidents ont affirmé qu’il n’y avait pas de primates sylvatiques.

Un groupe d’experts constitué à la demande du ministère de la santé par l’Organisation panaméricaine de la santé a conclu que les caractéristiques épidémiologiques et entomologiques de la flambée étaient celles d’une flambée urbaine transmise par Aedes aegypti. Avec l’appui du Groupe international de coordination de la fourniture de vaccins antiamarils, une campagne de vaccination réactive a été organisée dans les villes de SanLorenzo et Asunción en vue d’atteindre 1 852 888 personnes. La couverture vaccinale n’a pas été rapportée.

Cette flambée de fièvre jaune dans une zone urbaine est la première sur le continent américain depuis 1942. Compte tenu de la ré-infestation de nombreuses villes de la Région des Amériques par Aedes aegypti, les flambées en milieu urbain continuent de faire peser une grave menace sur la santé publique.

Pérou

En 2008, 15 cas de fièvre jaune ont été confirmés par des examens de laboratoire au Pérou (létalité de 60 %). Ces cas sont apparus dans les départements d’Amazonas (7), de San Martin (5), de Cusco (1), de Madre de Dios (1) et de Loreto (1). Parmi eux, 12 (80 %) étaient des hommes. L’âge des cas se situait entre 2 et 58 ans. Aucun d’eux n’avait été vacciné.

En 2009, 8 cas, dont 5 décès, ont été notifiés (7 cas confirmés en laboratoire et un par l’établissement d’un lien épidémiologique) ; la létalité était de 62,5 %. Ces cas ont été signalés dans les départe- ments suivants: Cusco (1 cas), Loreto (1) et San Martin (6). Les 7 cas confirmés étaient tous des hommes. L’âge de tous les cas se situait entre 12 et 43 ans. Sept cas n’avaient pas été vaccinés. Le statut vaccinal de l’autre cas n’était pas connu.

Vaccination et couverture vaccinale dans la Région des Amériques

La plupart des pays comportant des zones enzootiques de la Région des Amériques ont introduit le vaccin antiamaril dans leur calendrier de vaccination systématique en 2000. Le Panama notamment a commencé à vacciner systématiquement contre la fièvre jaune en 1974 et le Guyana a fait de même en 1980. Depuis 2009, 8 pays comportant des zones enzootiques ont introduit le vaccin dans leur calendrier national de vaccination s’appliquant à tous les enfants d’un an, en même temps que le vaccin contre la rougeole, la rubéole et les oreillons (RRO). Ces pays sont l’État plurinational de Bolivie, la République bolivarienne du Venezuela, la Colombie, le Guyana, le Paraguay, le Pérou et Trinité-et-Tobago. Le vaccin antiamaril est administré aux enfants à l’âge de 9 mois au Brésil et en Guyane française ; l’Équateur, le Panama et le Suriname vaccinent dans les zones enzootiques.

Le Paraguay a introduit la vaccination dans les zones limitrophes de municipalités enzootiques appartenant à des pays voisins en 2001 et l’Argentine l’a fait en 2002. En 2007, le Paraguay a décidé de rendre universelle la vaccination contre la fièvre jaune. La couverture par la vaccination antiamarile de routine des enfants a varié au fil du temps et selon les pays, mais la couverture vaccinale correspondante est souvent inférieure à celle obtenue pour le vaccin RRO.

Les activités de vaccination supplémentaire différaient selon les pays : elles pouvaient être menées en tant que campagnes faisant suite à des flambées ou en tant que campagnes préventives. En 2004, le Pérou a lancé la mise en œuvre d’un programme visant à vacciner 11 975 137 habitants de 2 à 59 ans des zones d’endémie, ainsi que les migrants arrivant dans ces zones. Fin 2008, le pays avait vacciné approximativement 11 millions de personnes, obtenant ainsi une couverture vaccinalemoyenne de 98 %, qui a été corroborée par une évaluation rapide de la couverture dans l’ensemble des régions, faisant partie du programme national.

A la suite d’une flambée qui s’est répandue en 2008 du Brésil au Paraguay et au nord de l’Argentine, le Paraguay a mené une campagne de vaccination à l’intention des individus âgés de plus d'un an vivant dans les zones atteintes ou dans les zones environnantes, ce qui a conduit à la vaccination de 3,5 millions de personnes au total. L’Argentine a également mené des campagnes de vaccination de masse au cours du premier trimestre 2008 ; près de 1,4 million de personnes ont été vaccinées. L’augmentation de l’activité de la fièvre jaune dans la Région des Amériques en 2008 a entraîné une pénurie mondiale de vaccins antiamarils.

Épizooties dans la Région des Amériques

En 2008 et 2009, certains pays ont exercé une surveillance des décès chez les primates. Leurs rapports amènent à confirmer plusieurs épizooties.

En novembre 2007 en Argentine, une épizootie confirmée en laboratoire a été identifiée dans le département d’Iguazu (province de Misiones). Au début du mois de janvier 2008, plusieurs singes morts ont été repérés dans les départements d’Apostoles, de Capital y Concepción, de Guarani et de San Pedro, qui se situent tous dans la province de Misiones.D’autres épizooties ont été confirmées dans cette province : en octobre 2008, lorsque 8 singes morts ont été signalés près de la localité d’El Soberbio, et en décembre 2008, lorsque 6 singes morts ont été signalés dans les communes d’Azúl, de Cerro, de Garupá et de San José (province de Misiones).

Au Brésil, en 2007, une circulation intense du virus a été mise en évidence chez des primates non humains dans les régions du centre et du sud-est; cette circulation a été suivie de la flambée de fièvre jaune sylvatique décrite précédemment. Cette épizootie a continué d’être observée dans la même zone en 2008.

Au Brésil, en octobre 2008, des singes morts ont aussi été repérés dans la partie nord-ouest de l’État de Rio Grande do Sul. Une surveillance active a été instaurée et d’autres zones épizootiques ont été découvertes en des lieux autrefois considérés comme non-enzootiques. Cette constatation a conduit les autorités nationales à mener une campagne de vaccination à grande échelle dans presque tout l’État du Rio Grande do Sul.La circulation sylvatique du virus de la fièvre jaune s’est poursuivie tout au long de l’année 2009 au Brésil, provoquant davantage de cas épizootiques (en particulier dans le Rio Grande do Sul) et de cas humains.

5. Conclusion

Ce point de situation de l'OMS montre que le risque de fièvre jaune reste élevé dans les zones d'endémicité de la maladie, qui sont l'Afrique et l'Amérique intertropicales. Il est important d'éviter toute pénurie de vaccin, qui pourrait compromettre les efforts de lutte.

Source : Weekly epidemiological record, N° 4, 21 janvier 2011 (OMS).