Découverte a posteriori d'un cas exceptionnel de rage des chauves-souris chez un patient décédé en aout 2019

Publié le 7 nov. 2020 à 21h02

Biographie

- Médecin responsable du centre de vaccinations internationales et du centre antirabique de Strasbourg.
- Médecin spécialisé en vaccinologie, en médecine des voyages et en léprologie. Formateur en vaccinologie et médecine des voyages pour la SMV.
- Membre de la Société de Médecine des Voyages (2006) et secrétaire général de la SMV (2015).

Liens d'intérêt

- Participation à divers EPU organisés par des associations de Médecins, Pharmaciens et/ou l’industrie pharmaceutique ; rémunération à la prestation. Activité uniquement pédagogique, en toute liberté avec garanties d'indépendance, impartialité et déontologie.
- Aucun investissement financier personnel ou familial dans une firme pharmaceutique.
- Aucune participation à des études cliniques de vaccins.
- Déclaration mise à jour le 14 novembre 2016.

En France, le diagnostic de rage chez un patient adulte décédé au CHU de Limoges en août 2019 dans un tableau d’encéphalite a été confirmé par le Centre national de référence (CNR) de la rage (1). 

Le diagnostic de rage n’avait pas été évoqué par les cliniciens pendant le séjour en réanimation du patient l’été dernier. Ce diagnostic a été obtenu dans le cadre d’un programme de métagénomique clinique. Ce programme, fruit d'une collaboration entre l’Hôpital Necker et l’Institut Pasteur, vise à identifier les causes des encéphalites non documentées grâce à l’analyse du contenu génétique d'échantillons prélevés après le décès des malades.

La détection des ARN viraux (génome du virus) par des techniques moléculaires (RT-PCR conventionnelle et qRT-PCR, une méthode permettant de quantifier l'ARN) s’est révélée positive pour trois échantillons prélevés chez le patient (deux biopsies cérébrales et une biopsie de méninges). Le typage moléculaire réalisé sur le gène complet de la nucléoprotéine virale a confirmé l’infection par un lyssavirus de l’espèce European bat 1 lyssavirus (EBLV-1), de sous-type a. Cette souche appartient au cluster A2 incluant des souches originaires du Limousin (2). Le virus de la rage EBLV-1a est régulièrement diagnostiqué en France métropolitaine chez les chauves-souris : huit sérotines communes (une espèce de chauve-souris) infectées par ce virus ont ainsi été identifiées en région Nouvelle Aquitaine en 2018 et 2019 (4 cas en Gironde, 2 cas dans les Pyrénées Atlantique, 1 cas dans les Landes et 1 cas dans la Vienne) (3).

Après interrogatoire des proches du patient, il s’avère que celui-ci était régulièrement en contact avec des chauves-souris sans notion de vaccination en pré ou post-exposition retrouvée.

Il s’agit d’un cas exceptionnel car, à ce jour, seul un autre cas humain d’encéphalite à EBLV-1 a été confirmé en Russie en 1985 (un second cas non confirmé virologiquement a également été évoqué en Ukraine en 1977). Ces cas s’ajoutent à deux autres cas de rage humaine décrits en Finlande en 1985 et au Royaume-Uni en 2020 impliquant une autre espèce de lyssavirus de chauves-souris, EBLV-2, circulant en Europe mais non encore retrouvée en France.

Cette année, le CNR de la rage avait rapporté un cas de rage causé par le virus EBLV-1 chez un chat en Côte-d'Or.

Références

  1. Centre National de Référence de la Rage.
  2. Troupin et al. Host Genetic Variation Does Not Determine Spatio-Temporal Patterns of European Bat 1 Lyssavirus Genome Biol Evol. 2017 Nov 1;9(11):3202-3213.
  3. Bourhy H. et al. Bulletin sur l'épidémiologie et la prophylaxie de la rage humaine en France.