Après une infection par le SARS-CoV-2, la vaccination anti-covid 19 pourrait ne comporter qu'une dose de vaccin à ARN

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Beaucoup de questions se posent encore sur l'immunité contre le coronavirus de la covid 19, qu'elle soit acquise au cours d'une infection ou maintenant par la vaccination. Certaines observations indiquent que l'immunité qui se développe après une infection asymptomatique ou bénigne est de faible niveau et de durée limitée, rendant possible des réinfections quelques mois après le premier épisode. A l'inverse, on soupçonne une réaction immunitaire en excès d'être un facteur déterminant dans certaines formes très agressives de covid 19.

On s'interroge donc sur la nécessité et la possibilité de vacciner sans risque les personnes déjà infectées par le SARS-CoV-2. Outre que cette vaccination ne doit être envisagée que si elle est bénéfique, la mise à disposition beaucoup trop lente des vaccins conduit logiquement à réserver en priorité les doses aux personnes immunitairement naïves, sans protection contre le virus. L'étude de F. Krammer et coll. apporte un éclairage, à même d'orienter la prise de décision.

Il a été constaté pendant les essais cliniques des vaccins à ARN messager de Pfizer-BioNTech (Comirnaty) et de Moderna que les personnes précédemment infectées par le SARS-CoV-2 pouvaient réagir plus fortement à la première dose de vaccin que les personnes naïves, présentant des effets indésirables plus nombreux et intenses. Leur réaction était en fait comparable à celle observée au moment de la seconde injection de vaccin chez les personnes initialement naïves.

Les auteurs de l'article ont étudié 109 individus ayant reçu une première dose de vaccin ; 68 d'entre eux n'avaient jamais été infectés par le coronavirus, alors que 41 avaient des anticorps au moment de leur vaccination. Dans le premier groupe, les anticorps anti-SARS-CoV-2 sont apparus à partir du 9 ou 12ème jour post-inoculation et leur concentration est restée modérée. Au contraire, chez les individus déjà séropositifs, la concentration en anticorps est montée en 5 à 8 jours à un niveau bien supérieur, allant jusqu'à dépasser les concentrations obtenues après la seconde injection chez les individus naïfs.

Dans un autre groupe de 231 individus, dont 148 séronégatifs et 83 séropositifs au moment de la vaccination, 159 ont présenté des effets indésirables. Alors que ces effets ont touché 66 % des séronégatifs, qui ont présenté surtout des effets locaux (douleur, rougeur au site d'injection), 73 % des séropositifs ont présenté des réactions qui ont été plus souvent généralisées (fièvre, fatigue, céphalées, myalgies). Chez les personnes préalablement infectées par le SARS-CoV-2, une dose unique de vaccin à ARN aurait donc un effet d'amplification ("boost") de la réponse immunitaire équivalent et même supérieur à celui de la seconde dose de vaccin chez des personnes naïves.

Les auteurs concluent qu'une seule dose de vaccin à ARN pourrait s'avérer suffisante pour protéger les personnes après une infection naturelle. Cette stratégie aurait pour avantage d'éviter la survenue d'effets indésirables et de laisser des doses de vaccin disponibles pour des personnes plus exposées. L'étude porte toutefois sur un effectif réduit, et elle ne s'est intéressée pour l'heure qu'aux deux vaccins à ARN, les plus efficaces disponibles à ce jour. Ses résultats devront être confirmés et éventuellement étendus aux autres vaccins ; en outre, si un critère sérologique est retenu pour décider d'administrer une ou deux doses de vaccin, il sera nécessaire de déterminer un seuil de séropositivité et de savoir si cette séropositivité garde la même signification quel que soit le temps écoulé depuis l'infection.

Référence

  1. F. Krammer, K. Srivastava et coll., Robust spike antibody responses and increased reactogenicity in seropositive individuals after a single dose of SARS-CoV-2 mRNA vaccine. medRxiv, 1er février 2021.