Vaccin MVA-BN contre la variole du singe, ou mpox : efficace et bien toléré

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Voici un an commençait une épidémie mondiale d’une maladie connue sous le nom de variole du singe, rebaptisée depuis mpox par l’OMS. Comme son nom l’indique, la maladie évoque la variole humaine (« smallpox » en Anglais), éradiquée dans les années 1970, bien qu’elle n’en ait pas la gravité. Elle est due toutefois à un virus très apparenté, le monkeypox (les virus smallpox et monkeypox sont tous deux des orthopoxvirus), répandu chez les singes et surtout chez des rongeurs en Afrique, et capable d’infecter l’Homme.
La mpox n’est pas une maladie nouvelle. Elle est connue depuis 1970 dans les régions forestières d’Afrique équatoriale où semble se situer principalement le réservoir de virus. Depuis 2000, les cas observés dans ces régions se font plus nombreux, peut-être en relation avec le temps écoulé depuis l’arrêt de la vaccination contre la variole et l’accroissement d’une population jamais vaccinée. En effet, la parenté entre les deux virus est suffisante pour que se développe une immunité croisée susceptible de protéger contre les deux maladies. Il a ainsi été montré dans les années 1980 que le vaccin antivariolique dérivé de la vaccine conservé dans de nombreux pays avait une efficacité de protection de 85 % contre la mpox.

En plusieurs occasions, des cas de mpox, restés peu nombreux, ont été identifiés hors d’Afrique. En 2003, suite à l’importation de rats de Gambie en provenance du Ghana aux USA, une épidémie s’est déclarée. Elle a touché 82 personnes, toutes entrées en contact avec des rongeurs contaminés, les rats de Gambie ayant transmis le virus à des chiens de prairie vendus en animalerie. Il n’y a pas eu de contamination interhumaine et tous les cas ont guéri.

L’épidémie qui a commencé en mai 2022 s’est présentée différemment. Des cas sont apparus dans plusieurs pays, en Amérique du Nord et en Europe, et leur nombre a rapidement augmenté. La transmission a été interhumaine et, pour une raison encore imprécise, elle a concerné surtout des hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes (HSH). La contamination se fait au niveau de la peau ou des muqueuses par contact direct, le virus se trouvant au niveau des lésions visibles mais aussi dans les gouttelettes de salive (postillons, éternuements), ou de façon indirecte, à partir d’objets contaminés (literie, linge, vaisselle). La progression rapide des cas a fait craindre une nouvelle pandémie, et l’OMS a déclaré un état d’urgence de santé publique le 23 juillet 2022. A la fin de l’année, l’épidémie avait touché tous les pays et on dénombrait plus de 80 000 cas confirmés. Bien que la maladie n’ait pas la gravité de la variole et qu’elle guérisse en général spontanément, on a compté 75 décès. Le traitement est généralement symptomatique mais, dans les formes compliquées, un médicament mis au point contre la variole et actif sur plusieurs poxvirus, le tecovirimat, peut être utilisé.

Le 27 avril, on comptait 5 002 cas en France, dont 3 120 en région Ile de France. Parmi les cas survenus chez des adultes, seuls 143 concernaient des femmes (1).

Avec l’arrêt de la vaccination antivariolique, une fraction croissante de la population humaine s’est trouvée non immunisée contre les infections par les poxvirus. Plusieurs de ces virus, dont celui du singe (monkeypox), mais aussi celui du chameau (camelpox) et même celui de la variole, toujours conservé dans quelques laboratoires, pourraient être la cause de nouvelles épidémies. Devant cette menace, on a cherché des moyens de prévention. Le vaccin antivariolique historique, produit sur la peau d’animaux dans des conditions mal contrôlées et administré par scarification, était efficace mais de mise en œuvre délicate et souvent responsable d’effets indésirables graves, peu tolérables alors que le risque de variole est en principe éliminé. On a donc mis au point des vaccins de deuxième génération, respectant des normes de stérilité plus strictes, puis de troisième génération. Ces derniers sont produits à partir de souches de vaccine présentant les mêmes antigènes que la vaccine historique, mais incapables de se répliquer chez les sujets vaccinés et donc de provoquer des infections locales ou généralisées, en particulier chez les personnes immunodéprimées. La souche MVA (Modified vaccine Ankara), obtenue en Allemagne dans les années 1960 par passage multiple sur culture de cellules d’embryons de poule, a permis d’élaborer un vaccin dont l’utilisation a commencé avant l’interruption de la vaccination antivariolique. Il était alors également administré par scarification et n’a pas été à l’origine d’effets indésirables graves, mais son efficacité contre la variole en conditions réelles n’a pas été démontrée puisque la maladie avait disparu. Des essais, dans lesquels il a été possible d’inclure des personnes immunodéprimées, dont des porteurs du VIH, ont cependant montré que les vaccins MVA induisaient bien l’apparition d’anticorps capables de neutraliser les principaux poxvirus. Le laboratoire danois Bavarian Nordic a poursuivi leur amélioration et produit aujourd’hui un vaccin MVA-BN, commercialisé sous le nom Imvanex en Europe, Imvamune au Canada et Jynneos aux États-Unis, à présent administré par injection sous-cutanée.

L’efficacité de la vaccination antivariolique contre la mpox a été suspectée lorsqu’on a constaté que les individus vaccinés semblaient protégés lors d’épisodes survenus en Afrique. Elle a depuis été confirmée dans plusieurs essais, chez l’animal puis chez l’Homme, en particulier en RDC où les cas de mpox sont relativement fréquents. Elle vient de l’être également dans l’étude française DOXYVAC qui visait à améliorer la protection contre les infections sexuellement transmissibles chez les hommes porteurs du VIH ayant des rapports sexuels avec des hommes. Cette étude, déjà présentée dans Mesvaccins.fr (actualité du 10 mars 2023), a été élargie à la protection contre la mpox lorsqu’il est apparu que la plupart des cas de cette maladie se produisaient dans la population visée. Elle a montré que l’arrivée de la vaccination par le MVA-BN avait remarquablement réduit le risque de mpox : dans le communiqué de presse paru le 23 février, l’efficacité de protection a été estimée à 99 % (2). Des précisions sont toutefois attendues, en fonction du schéma de vaccination (1 ou 2 doses, voie sous-cutanée ou intradermique), du moment de l’administration (pré- ou post-exposition).

Plusieurs études indiquent par ailleurs la bonne tolérance du vaccin, dont les effets indésirables sont essentiellement locaux et spontanément réversibles (rougeur au point d’injection, œdème, prurit). Une publication australienne récente les détaille, en fonction de la voie d’administration et du nombre de doses (3).

Depuis quelques mois, on constate une diminution du nombre de cas de mpox dans le monde. Le 11 mai, l’OMS a déclaré la fin de l’urgence de santé publique (4). Cependant, pour plusieurs observateurs, une reprise épidémique reste possible, l’immunité des populations contre les poxvirus se trouvant partout à un très faible niveau. Aux USA, dans la région de Chicago, des cas survenus récemment chez des personnes vaccinées sont en cours d’investigation (5). L’utilisation plus ou moins large du vaccin, sa disponibilité, l’identification et la priorisation de populations à risque devraient donc faire l’objet d’une réflexion et de décisions.

Références

  1. Variole du singe (mpox) : point de situation en France au 27 avril 2023.
  2. Nouvelles données d’efficacité d’un vaccin contre le méningocoque B et d’un antibiotique préventif pour réduire le risque d'IST bactériennes et efficacité démontrée du vaccin MVA-BN contre mpox.
  3. L. Deng, L.K. Lopez et coll. Short-term Adverse Events Following Immunization With Modified Vaccinia Ankara-Bavarian Nordic (MVA-BN) Vaccine for Mpox.
  4. L’OMS déclare que l'urgence de santé publique mpox est terminée.
  5. Potential for Mpox Resurgence This Summer: Q&A With CDC's Christopher Braden, MD.

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