Vaccination contre la coqueluche : nouvelles recommandations pour les adultes

Publié le 14 mar. 2014 à 19h04

Biographie

- Professeur agrégé du Val-de-Grâce, professeur invité à l'Université de Bordeaux.

Liens d'intérêt

- Aucune perception de rémunération ou de tout autre avantage de l'industrie pharmaceutique.
- Aucun investissement financier dans une firme pharmaceutique.
- Aucune participation à des études cliniques de vaccins.
- Aucune rémunération ou avantages reçus de l'industrie pharmaceutique.
- Déclaration mise à jour le 12 avril 2023.

Le Haut Conseil de la santé publique a diffusé le 15 mars 2014 sur son site Internet un nouvel avis relatif à la stratégie vaccinale contre la coqueluche chez l'adulte daté du 20 février 2014. Auparavant, il n'y avait pas lieu d'administrer plus d'une dose de vaccin quadrivalent diphtérie-tétanos-coqueluche-poliomyélite (dTcaP) chez l'adulte. Cette recommandation a été révisée après une analyse de la littérature et de l'expérience acquise dans l'utilisation des vaccins contre la coqueluche chez les adultes.

1. La coqueluche - Intérêt de la vaccination

La coqueluche est une maladie respiratoire due à une bactérie, Bordetella pertussis. Très contagieuse, elle se transmet par les gouttelettes émises lors de la toux. Elle peut atteindre les nourrissons, les enfants et les adultes, mais les cas graves, parfois mortels, surviennent chez les très jeunes nourrissons non vaccinés (notamment avant 3 mois).

La coqueluche entraîne des accès de toux mal tolérés, entrainant des difficultés respiratoires importantes, une asphyxie, des apnées et des bradycardies (ralentissement du rythme cardiaque). Les autres complications à cet âge sont les pneumopathies de surinfection.

La coqueluche dite "maligne" se traduit par une détresse respiratoire suivie d'une défaillance polyviscérale (c'est-à-dire de plusieurs organes comme le foie, les reins, le cerveau). Cette forme rend compte de la quasi-totalité des décès déclarés liés à la coqueluche. 

Les nourrissons sont le plus souvent contaminés par des adultes, notamment les parents, ou par la fratrie. D'où l'intérêt de vacciner les adultes en contact avec des nourrissons pour protéger ceux-ci : c'est la stratégie du cocooning.

2. Vaccins contre la coqueluche utilisés chez l'adulte

Il n'existe pas de vaccin coquelucheux monovalent, c'est-à-dire qui serait utilisable pour protéger contre la coqueluche uniquement. Les vaccins utilisés pour vacciner les adultes sont des vaccins combinés, qui protègent contre quatre maladies : la diphtérie (d), le tétanos (T), la poliomyélite (P) et la coqueluche (ca). Les lettres minuscules (« d » pour la valence diphtérique et « ca » pour « coquelucheux acellulaire ») indiquent un dosage réduit en antigènes. Un vaccin coquelucheux acellulaire est un vaccin qui ne contient pas de cellules bactériennes entières (contrairement à l'ancien vaccin coquelucheux dit « germes entiers ») mais uniquement des sous-unités antigéniques de Bordetella pertussis. Seuls deux vaccins dTcaP sont disponibles en France : le vaccin Repevax® et le vaccin BoostrixTetra®. Ces vaccins contiennent plusieurs antigènes purifiés de Bordetella pertussis.

3. Tolérance des vaccins contre la coqueluche chez l'adulte

Plusieurs études ont comparé la fréquence de survenue des effets indésirables après une injection de vaccin quadrivalent coquelucheux dTcaP et après l'administration d'une dose de rappel de ce vaccin 1 mois, 2 ans, 5 ans ou 10 ans plus tard. D'une manière générale, les effets indésirables les plus fréquents sont locaux : douleur, rougeur et gonflement au site d'injection. Les effets indésirables généraux sont des myalgies, des céphalées ou un malaise. Une dose de rappel 10 ans après une dose précédente peut induire une augmentation des rougeurs et des gonflements, mais la fréquence des réactions générales ne semble pas modifiée.

Dans toutes les études, aucun effet indésirable grave lié à la vaccination n'a été rapporté. A noter que la tolérance du vaccin dTcaP était similaire, qu'il soit administré un mois après une dose de dTP ou après un placebo.

4. Efficacité des vaccins coquelucheux

Une étude cas-contrôle effectuée au cours d'une épidémie de coqueluche survenue en 2006 dans une école militaire en France a montré une efficacité vaccinale élevée, proche de 80 %, chez les adolescents et jeunes adultes dont le dernier rappel avait été effectué dans un délai inférieur ou égal à 6 ans. La protection chute rapidement au delà. Une autre étude évaluant la persistance des anticorps est en faveur de rappels vaccinaux tous les 10 ans.

5. Justification d'une modification des recommandations vaccinales

La pratique de rappels de vaccination anticoquelucheuse chez l'adulte dans le cadre du cocooning et en milieu professionnel est justifiée par l'épidémiologie et rendue possible par les données de tolérance.

Dans le calendrier vaccinal 2013, l'administration d'un vaccin dTcaP est recommandée à l'âge de 25 ans si la personne n'a pas reçu de vaccin contre la coqueluche depuis plus de 5 ans. Le maintien de cet intervalle est justifié par la probabilité de ces personnes d'être en situation de cocooning dans les années à venir et par la durée présumée de protection conférée par le vaccin à cet âge. Il paraît par ailleurs logique, pour les personnes n'ayant pas reçu ce rappel à l'âge de 25 ans, de permettre un rattrapage par l'administration d'un vaccin dTcaP plutôt qu'un vaccin dTP jusqu'à l'âge de 39 ans révolus.

En revanche, en milieu professionnel, l'application d'un tel délai est peu compatible avec le nouveau calendrier vaccinal qui prévoit des intervalles de 20 ans entre les rappels dTP et en l'absence de vaccin coquelucheux monovalent.

Le choix est de calquer les rappels coquelucheux sur les rappels dTP chez les professionnels de santé et de la petite enfance. Cette mesure devrait permettre une amélioration sensible de la couverture vaccinale contre la coqueluche, actuellement très insuffisante dans ces populations, de 8 % à 44 % suivant les catégories professionnelles, médicales ou paramédicales. Cette recommandation pourra être reconsidérée dès lors que la durée de protection réelle conférée par le vaccin sera connue ou si un vaccin coquelucheux monovalent devenait disponible.

Enfin, les données de tolérance ne révèlent pas de majoration des effets indésirables lors du raccourcissement des délais entre une administration de vaccin dTP et de vaccin dTcaP. Il n'existe donc pas de justification à maintenir un délai minimal de deux ans entre ces deux administrations.

6. Nouvelles recommandations de vaccination contre la coqueluche

6.1. Dans le cadre du calendrier vaccinal en vigueur, le rappel recommandé à l'âge de 25 ans doit comporter la valence coqueluche (vaccin dTcaP), sauf si la personne a reçu dans le cadre du cocooning une dose de vaccin coquelucheux depuis moins de cinq ans. Les personnes qui auront manqué le rendez-vous à l'âge de 25 ans pourront bénéficier d'un rattrapage du vaccin dTcaP jusqu'à l'âge de 39 ans révolus.

6.2. Dans le cadre de la stratégie du cocooning (hors milieu professionnel), il est recommandé que :

  • les personnes non antérieurement vaccinées contre la coqueluche ou n'ayant pas reçu de vaccin coquelucheux depuis l'enfance reçoivent une dose de vaccin dTcaP en respectant un délai d'un mois par rapport au dernier vaccin dTP (au lieu de deux ans auparavant). Le recalage sur le calendrier en cours se fera suivant les recommandations du calendrier vaccinal en vigueur ;
  • les personnes antérieurement vaccinées à l'âge adulte contre la coqueluche dans le cadre du cocooning et à nouveau en situation d'être en contact étroit et durable avec des nourrissons âgés de moins de 6 mois, reçoivent une dose de rappel de vaccin dTcaP si la vaccination anticoquelucheuse antérieure remonte à plus de 10 ans. Un délai d'un mois doit être respecté par rapport à un éventuel vaccin dTP. Le recalage sur le calendrier en cours se fera suivant les recommandations du calendrier vaccinal en vigueur. 

6.3. Dans le cadre de la vaccination coquelucheuse en milieu professionnel, il est recommandé que :

  • les professionnels concernés non antérieurement vaccinés contre la coqueluche ou n'ayant pas reçu de vaccin coquelucheux depuis l'enfance reçoivent une dose de vaccin dTcaP en respectant un délai d'un mois par rapport au dernier vaccin dTP. Le recalage sur le calendrier en cours se fera suivant les recommandations du calendrier vaccinal en vigueur ; pour ces professionnels, les rappels administrés aux âges de 25, 45, 65 ans comporteront systématiquement la valence coquelucheuse (vaccin dTcaP). Pour les personnes ayant déjà reçu une dose de vaccin coquelucheux à l'âge adulte, le recalage sur le calendrier en cours se fera suivant les recommandations du calendrier vaccinal en vigueur.

6.4. Un intervalle de 10 ans est nécessaire entre une coqueluche documentée et une revaccination coquelucheuse chez un adulte, si celle-ci est recommandée.

7. Personnes concernées par ces recommandations

La liste des personnes pour lesquelles la vaccination contre la coqueluche est recommandée n'a pas été modifiée. Il s'agit : 

7.1. Dans le cadre du cocooning

  • Les couples ayant un projet parental
  • Au cours de la grossesse :
    - les enfants de la fratrie, le conjoint ;
    - les personnes susceptibles d'être en contact étroit et durable avec le futur nourrisson au cours de ses 6 premiers mois. Ceci peut concerner notamment, les grands-parents.
  • En post-partum immédiat :
    - la mère qu'il conviendrait idéalement de vacciner avant la sortie de la maternité, même si elle allaite ;
    - l'entourage, si la mise à jour de la vaccination n'a pas été faite antérieurement. 

7.2. Dans le cadre professionnel 

  • Le personnel soignant dans son ensemble, y compris dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Les personnes travaillant en contact étroit avec les nourrissons âgés de moins de 6 mois (maternité, service de néonatologie, service de pédiatrie) doivent être vaccinées en priorité ;
  • Les étudiants des filières médicales et paramédicales ; 
  • Les professionnels chargés de la petite enfance ;
  • Les nourrices et personnes effectuant régulièrement du baby-sitting.

Ces nouvelles recommandations seront prises en compte par le système expert de MesVaccins.net le 17 mars 2014.

Source : Haut Conseil de la santé publique.