Recrudescence de cas importés de dengue en France hexagonale : Santé publique France et la Direction générale de la Santé appellent à la vigilance à l’approche de la saison d’activité du moustique tigre

Le nombre de cas importés de dengue signalés en métropole atteint des chiffres bien plus élevés que les années précédentes. Entre le 1er janvier et le 14 avril 2024, 1 361 cas de dengue importée ont été notifiés versus 122 sur la même période en 2023. Plus de 80% de ces cas revenaient de Martinique ou de Guadeloupe, et 6% de Guyane, où des épidémies sont en cours depuis mi-2023 (voir le point en fin de cette nouvelle).

Cette situation intervient alors que l'Organisation panaméricaine de la santé (OPS) a mis en garde contre une forte augmentation des cas de dengue dans les Amériques, par rapport aux années précédentes. Entre les semaines 2024-01 et 2024-12, le taux d'incidence cumulé dans la région des Amériques était de 451 cas pour 100 000 habitants, soit 3 fois plus que pour la même période en 2023 et 5 fois plus que le nombre moyen de cas sur cette période au cours des 5 dernières années.

Santé publique France appelle à la vigilance des professionnels de santé pour diagnostiquer et signaler les cas aux autorités sanitaires, ainsi que des voyageurs à l'approche de la saison d'activité des moustiques vecteurs du virus, entre mai et novembre.

Le risque de voir apparaitre une circulation locale des virus de la dengue, du chikungunya ou de Zika à partir d’un cas importé est aujourd’hui accru compte-tenu de l’accroissement significatif du nombre de cas importés en provenance des zones d’épidémie. Ce risque est limité à la période d’activité du moustique tigre, actuellement de mai à novembre en France métropolitaine mais qui pourrait s’allonger dans l’avenir à la faveur du changement climatique.

1. Recommandations aux professionnels de santé

Le diagnostic de dengue doit être évoqué devant tout syndrome fébrile et algique associé à un antécédent de voyage en zone de circulation du virus ou survenant entre mai et novembre dans une zone où le moustique tigre est actif.

Ces patients doivent ainsi être orientés vers la réalisation d’un diagnostic biologique (par RT-PCR ou sérologie, selon la date de début des signes) : RT-PCR sur sérum jusqu’à 5 jours après le début des signes (J5) ; RT-PCR et sérologie entre J5 et J7 ; sérologie seule après J7 (IgM et IgG) avec un second prélèvement au plus tôt 10 jours après le premier. Ces examens peuvent être faits par tout laboratoire de biologie médicale ; chaque échantillon doit être accompagné de renseignements cliniques.

Le signalement de tout cas de dengue, importé ou autochtone, documenté biologiquement (probable ou confirmé) est obligatoire, et doit être réalisé au plus tôt auprès l’Agence régionale de santé par tout moyen (téléphone, mail, fax) pour permettre de mettre en œuvre des investigations et des mesures de lutte antivectorielle dans les lieux fréquentés par les malades durant leur phase de virémie.

2. Recommandations pour les voyageurs et les malades

Pendant le séjour en zone à risque de dengue, les moustiques transmetteurs de la maladie sont actifs au cours de la journée. Les bons gestes à adopter pour se protéger et éviter de se faire piquer par des moustiques sont les suivants :

  • Utiliser des répulsifs cutanés sur les parties du corps non couvertes, en complément du port de vêtements amples, couvrants et légers ;
  • Dormir sous moustiquaire ;
  • En complément, utiliser la climatisation, un ventilateur, un diffuseur électrique d’insecticide, un serpentin fumigène à l’extérieur.

Pendant les 15 jours suivant son retour de régions où des cas de dengue ont été signalés, il est recommandé :

  • de consulter un médecin en cas de fièvre et de lui indiquer de quelles régions on revient ;
  • de continuer à se protéger contre les piqûres de moustique pour éviter qu’un moustique tigre, en piquant, soit contaminé à son tour, par le virus de la dengue. Il pourrait alors transmettre le virus à d’autres personnes, lors d’une piqûre.

En de dengue confirmée, les malades doivent éviter les piqûres de moustiques durant la phase de l’infection où le virus de la dengue est présent dans le sang. Cette phase qui débute 48 heures avent le début des premiers signes de la maladie se poursuit jusqu’à J7.

3. Le point au 11 avril 2024 sur les épidémies de dengue aux Antilles et en Guyane

3.1. Guadeloupe

On enregistre une relative stabilité du nombre de cas cliniques vus en ville depuis début mars 2024, à des niveaux qui restent élevés. Un maintien de ce niveau élevé de circulation est propice à une nouvelle augmentation de la circulation virale dès l’arrivée de la saison des pluies.

Depuis le début de l’épidémie (SE 30-2023) on estime que 14 100 patients ont consulté en médecine de ville pour un syndrome de dengue.
Cinquante-cinq cas graves de dengue ont été recensés depuis le début de l’épidémie. Parmi ces cas, 24 concernent des enfants. Les services de pédiatrie ont également signalé des cas de thrombopénies sévères. Les données sont en cours de consolidation. Parmi ces 55 cas graves de dengue recensés, 7 décès directement imputables à la dengue ont été signalés.

3.2. Martinique

La décrue de l’épidémie reste lente, même en cette période de sécheresse, potentiellement propice à une mise en eau moins importante des gîtes larvaires et donc une densité plus faible du moustique vecteur Aedes aegypti.

Depuis le début de l’épidémie (SE 30-2023) on estime que 18 060 patients ont consulté en médecine de ville pour un syndrome de dengue et 3 776 ont été vus par SOS-Médecins. A ce jour, 1 592 passages aux urgences pour syndrome de dengue ont été recensés parmi lesquels 369 (23 %) passages ont été suivis d’une hospitalisation.

Depuis le début de l’épidémie, 29 cas graves de dengue ont été recensés dont onze cas pédiatriques. Les services de réanimation adulte et pédiatrique ont également signalé des cas de thrombopénies sévères. Les données sont en cours de consolidation. Neuf décès parmi les cas graves de dengue ont été rapportés dont 6 directement imputables à la dengue, 3 indirectement imputables à l’infection.

3.3. Guyane

Après une forte hausse de la circulation du virus de la dengue en Guyane au cours du mois de janvier, celle-ci s’est stabilisée à un niveau très élevé durant 4 semaines avant d’entamer une baisse début mars. Le nombre hebdomadaire de cas cliniquement évocateur a été divisé par deux depuis la première semaine de mars.

En S14-2024, la circulation du virus de la dengue est en baisse sur l’ensemble du territoire. Elle reste cependant à un niveau élevé à l’exception de l’Oyapock où elle atteint un niveau très bas. La vigilance reste de mise avec la reprise de la saison des pluies.

Le sérotype DENV-2 a été majoritairement identifié en S14 (76% de DENV-2 et 24% de DENV-3 parmi les prélèvements sérotypés); il est majoritaire dans l’ensemble des secteurs. Le sérotype DENV-1, qui circule actuellement au Brésil, a été identifié en S13 dans le secteur de l’Oyapock.

Depuis janvier 2023, 18 554 cas cliniquement évocateurs de dengue, vus en consultation de médecine générale ou en centre de santé et 10 609 cas confirmés ont été recensés, dont respectivement 11 638 et 7 821 en 2024.

Sources : Santé publique France, Direction générale de la Santé