Vaccination contre la coqueluche : quelles sont les priorités ?

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La coqueluche est une maladie respiratoire très contagieuse transmise par les gouttelettes émises lors de la toux. Cette maladie est particulièrement grave, voire mortelle, chez le jeune nourrisson. Elle est causée par la bactérie Bordetella pertussis, qui possède plusieurs facteurs de virulence, notamment la toxine pertussique.

L'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) vient d'actualiser les données concernant la coqueluche et sa prévention par la vaccination dans une note de synthèse qui remplace le document précédent publié en 2010 et le document sur le choix des vaccins édité en juillet 2014. A ce titre, il faut rappeler que le principal objectif de la vaccination contre la coqueluche est de réduire le risque de coqueluche grave chez les nourrissons et les jeunes enfants.

La coqueluche reste une maladie endémique dans tous les pays, d'où l'intérêt d'une couverture vaccinale élevée pour protéger les nourrissons des formes sévères de cette maladie.

Malgré l'introduction de programmes de vaccination efficace et l'obtention d'une couverture vaccinale mondiale élevée, estimée en 2014 à 86 % pour 3 doses de vaccin contenant la valence coqueluche, des cycles épidémiques sont enregistrés tous les 2 à 5 ans (typiquement tous les 3 à 4 ans). En dépit de données de surveillance rares, en particulier dans les pays en voie de développement, l'OMS avait estimé en 2013 que la coqueluche était responsable dans le monde de 63 000 décès par an chez les enfants de moins de 5 ans. Afin de réduire le risque de coqueluche grave chez les nourrissons et les jeunes enfants (âgés de moins de 5 ans) et compte tenu de la mortalité provoquée par cette maladie, l'OMS préconise de maintenir une forte couverture vaccinale, supérieure ou égale à 90 %, par au moins 3 doses de vaccin coquelucheux.

En France, la couverture vaccinale contre la coqueluche était en 2013 de97 % pour 3 doses de vaccins contenant la valence coquelucheuse. De 1979 à 2011, le nombre annuel de décès est au nombre de 3 (0 à 11 décès selon les années).

Parmi les facteurs ayant contribué à accroître le nombre de cas enregistrés, l'OMS relève un diagnostic de laboratoire plus performant pour la maladie par l'accès aux technologies moléculaires, un renforcement de la surveillance des cas, une durée d'efficacité des vaccins limitée selon la composition des vaccins contre la coqueluche (les vaccins à germes entiers conférant une protection de plus longue durée que les vaccins acellulaires).

La coqueluche induit une immunité naturelle limitée dans le temps bien que la durée de protection conférée par la maladie soit difficile à déterminer. On sait que ni le type des anticorps (dirigés spécifiquement contre la toxine pertussique), ni le titre d'anticorps ne sont bien corrélés avec la protection clinique. Des réinfections symptomatiques sont possibles chez les enfants, les adolescents et les adultes. Des rappels vaccinaux contre la coqueluche chez des personnes ayant présenté la maladie sont nécessaires pour limiter le risque de récidive. Ainsi, le Haut Conseil de la santé publique en France a fixé un intervalle de 10 ans entre une coqueluche documentée et une revaccination coquelucheuse chez l'adulte.

Par ailleurs, malgré le passage placentaire des anticorps coquelucheux naturels, la plupart des nourrissons ne semblent pas être protégés contre la maladie clinique pendant les premiers mois de la vie, à moins que leur mère ait été récemment vaccinée, en raison de la quantité insuffisante des anticorps transférés.

Les vaccins contre la coqueluche sont très hétérogènes mais ils sont tous combinés à d'autres antigènes

L'OMS rappelle que deux types de vaccins contre la coqueluche sont disponibles : les vaccins à germes entiers, qui contiennent les bactéries entières inactivés (dont certains composants bactériens capables d'entrainer de la fièvre ou des réactions inflammatoires au site d'injection)et les vaccins acellulaires (ainsi dénommés cas ils ne contiennent pas de cellules bactériennes entières mais des fractions antigéniques, notamment la toxine pertussique).

Actuellement, de nombreux pays utilisent les vaccins acellulaires, dont la France, compte tenu de la réactogénicité plus importante des vaccins à germes entiers.

Les vaccins contre la coqueluche disponibles sont très hétérogènes dans leur composition, par le nombre et la concentration des composés antigéniques, les méthodes d'inactivation, la nature de l'adjuvant, le conservateur dans les flacons multidoses, les valences combinées (diphtérie, tétanos, poliomyélite, Haemophilus influenzae type b, Hépatite B).

En France, les vaccins disponibles sont tous des vaccins acellulaires et contiennent des sels d'aluminium utilisés comme adjuvant, pour améliorer la réponse immunitaire. Ils se différencient selon leur composition antigénique, les antigènes énumérés ci-après correspondant à des protéines qui sont aussi des facteurs de virulence de la bactérie :

Les vaccinsBoostrixtetraetRepevaxcontiennent une dose réduite d'anatoxine coquelucheuse (l'anatoxine est une toxine détoxifiée par un traitement spécifique) et diphtérique, diminuant le risque de réaction allergique. Les vaccins à dose réduite sont adaptés à la réalisation des rappels chez l'adolescent et l'adulte ; ils sont recommandés actuellement en France dès l'âge de 6 ans, en raison de la pénurie actuelle en vaccins à dose entière. Le nombre de valences antigéniques combinées est également variable, permettant la protection contre 4 à 6 maladies au total.

Une analyse des données des essais cliniques (essais randomisés) indique que les vaccins acellulaires comportant au moins trois antigènes coquelucheux sont plus efficaces contre la coqueluche typique que les vaccins à un et deux composants (80-84 % versus 67-70 % en efficacité absolue). Cependant sur le terrain (études observationnelles) et après utilisation à grande échelle des vaccins coquelucheux acellulaires, ceux-ci ont fait la preuve d'une forte efficacité quelle que soit la composition en antigènes coquelucheux.

Efficacité équivalente des vaccins contre la coqueluche à germes entiers et des vaccins acellulaires dans la prévention de la coqueluche

En termes de primo-vaccination, l'OMS aborde la question du choix du type de vaccin contre la coqueluche et du passage des vaccins à germes entiers vers des vaccins acellulaires. Les efficacités des vaccins à germes entiers et acellulaires sont similaires contre une coqueluche documentée, de l'ordre de 50 % contre la coqueluche sévère chez le nourrisson après l'administration d'une dose et de 80 % au moins après l'administration de 2 doses. La troisième dose de vaccin en primo-vaccination confère une efficacité durable au cours de la première année de vie.

Comme la durée de protection s'estompe avec le temps, il est indispensable de proposer une dose de rappel périodique supplémentaire ou la vaccination de la mère, en particulier quand la primovaccination des nourrissons a été initiée avec des vaccins acellulaires. C'est la stratégie de vaccination adoptée par de nombreux pays, qui recommandent dans leurs calendriers vaccinaux nationaux des doses de rappel. S'agissant du choix de la stratégie vaccinale, l' OMS préconise une primovaccination à trois doses dont la première dose dès l'âge de 6 semaines, la primovaccination devant être achevée avant l'âge de 6 mois.

Pour les pays recommandant chez les nourrissons un schéma vaccinal à deux doses en primo-vaccination et un rappel , ce qui est le cas de la France, cette stratégie doit s'appuyer sur des données épidémiologiques fiables et une couverture vaccinale élevée.

En France, la coqueluche fait l'objet d'une surveillance des formes pédiatriques sévères par le réseau Renacoq. Concernant l'administration de doses de rappel vaccinal contre la coqueluche chez les adolescents et les adultes, l'intérêt est de diminuer le risque de transmission de la maladie à leur entourage et essentiellement aux nourrissons trop jeunes pour être protégés eux-mêmes par la vaccination. Il s'agit d'augmenter la durée de protection vaccinale et d'assurer une protection de l'entourage (stratégie du cocooning). Il faut noter que la vaccination de la population générale française contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite (dTP) a évolué en 2013 : au lieu d'un rappel vaccinal tous les 10 ans, la vaccination dTP est réalisée à âge fixe (25 ans, 45 ans, 65 ans, puis tous les 10 ans). Seul le rappel de 25 ans est associé à la valence coquelucheuse, celle-ci n'étant administrée ultérieurement qu'en situation de cocooning.

En ce qui concerne les adultes, l'OMS préconise la vaccination prioritaire du personnel soignant, afin de prévenir la transmission nosocomiale aux nourrissons en milieu de soins. La vaccination de tous les professionnels de santé et de la petite enfance contre la coqueluche est recommandée en France depuis 2008. Sur le plan pratique, pour tout nouveau professionnel ou professionnel déjà en fonction, dont on découvre le statut vaccinal, recevront une dose de vaccin contre la coqueluche si le dernier vaccin coquelucheux a été administré il y a plus de 5 ans. Puis ce personnel recevra un vaccin contenant la valence coquelucheuse (dTPca) à l'âge de 25,45, 65 ans.

La vaccination des femmes enceintes contre la coqueluche : plus efficace et bénéfique que la stratégie du cocooning

La stratégie du cocooning est destinée à protéger les nourrissons trop jeunes pour être vaccinés en réduisant le risque de transmission de l'infection par la vaccination de leur entourage, celui-ci étant susceptible de représenter une source de contamination. La stratégie du cocooning présente un effet bénéfique sur la prévention de la maladie si on peut obtenir une couverture vaccinale élevée. Cependant, les données épidémiologiques récentes indiquent que la vaccination des femmes enceintes avec un vaccin contenant la valence coquelucheuse acellulaire au cours du premier trimestre de grossesse ne comporte pas de risque pour la mère ou le fœtus et présente une grande efficacité dans la protection des nouveaux nés contre la coqueluche durant le premier mois de vie, réduisant la morbidité et la mortalité chez les nourrissons. Cette stratégie adoptée au Canada, aux États-Unis et au Royaume Uni a montré son efficacité sur la réduction de la mortalité chez le nourrisson. Le calendrier vaccinal français ne recommande pas pour l'instant la vaccination des femmes enceintes.

Références

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