Covid 19 : l'Université d'Oxford et AstraZeneca communiquent à leur tour sur l'efficacité de leur vaccin, ChAdOx1-nCoV-19

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Tour à tour, Pfizer-BioNTech, Moderna et l'institut Gamaleya ont annoncé avoir mis en évidence une efficacité de leurs vaccins (respectivement Bnt162b2, mRNA-1273 et Spoutnik-V) de 90 % ou plus lors de l'analyse intermédiaire des essais de phase 3 dans lesquels ils sont engagés. On dénombre à ce jour 11 candidats parvenus à ce stade des essais, utilisant des stratégies différentes, laissant présager d'une offre vaccinale variée.

Les chercheurs de l'institut Jenner, à l'Université d'Oxford, ont mis au point un vaccin vectorisé, baptisé ChAdOx1-nCoV-19 ou AZD1222, utilisant un adénovirus atténué du Chimpanzé, rendu incapable de se répliquer. Le génome constitué d'ADN du virus permet d'insérer une séquence codant la protéine de surface S du SARS-CoV-2. Cette séquence est également un fragment d'ADN, obtenu par copie ou "transcription inverse" du gène du coronavirus, puisque celui-ci est fait d'ARN. Les particules d'adénovirus ainsi modifiées vont délivrer cette information génétique aux cellules, qui vont exprimer transitoirement les protéines correspondantes sans qu'il y ait production de nouvelles particules puisque la réplication virale ne peut pas être menée à bien. L'adénovirus sert ainsi de vecteur, protégeant le fragment d'ADN et l'acheminant jusqu'au noyau des cellules d'où il va diriger la synthèse des protéines ou fragments de protéines qui serviront d'antigènes vaccinants.

Les résultats des essais de phase 1/2 étaient encourageants. Ils avaient montré l'apparition d'anticorps neutralisant le SARS-CoV-2 chez plus de 90 % des participants après une première administration, et chez tous les participants après la deuxième ("boost"). Toutefois, les effets indésirables locaux ou généraux (phénomènes douloureux, malaises, frissons, fièvre), tous réversibles, avaient été nombreux. Aucun n'a été considéré comme grave. Des résultats comparables étaient alors présentés pour un candidat vaccin développé par le laboratoire chinois CanSino Biologics de Wuhan, utilisant un autre adénovirus, humain, comme vecteur (1).

Une première analyse de l'essai de phase 2/3 du vaccin "Oxford" a été publiée le 19 novembre (2). Elle n'a concerné que la composante 2 de l'essai, dans laquelle sont observées la tolérance au vaccin et son pouvoir immunogène chez des personnes saines, à l'exclusion de son efficacité (celle-ci fait l'objet de la phase 3 et ne peut être mesurée que chez des personnes exposées au virus). Cinq cent soixante volontaires, hommes et femmes, âgés de 18 à plus de 70 ans, ont été inclus dans cet essai. Certains ont reçu deux doses du vaccin ChAdOx1-nCoV-19 à 28 jours d'intervalle, alors que d'autres recevaient un vaccin anti-méningocoque utilisé comme comparateur. Les investigateurs ont relevé les événements indésirables survenus chez tous les participants, et dosé les anticorps anti-SARS-CoV-2. Ils ont observé les mêmes effets indésirables que lors des phases précédentes, plus fréquents avec ChAdOx1-nCoV-19 qu'avec le vaccin contrôle, mais se faisant plus rares chez les personnes de plus de 56 ans. Par ailleurs, des anticorps neutralisants et une réponse cellulaire T ont été détectés chez la quasi-totalité des participants (dès la 1ère dose pour la réponse cellulaire), permettant d'évoquer un bon niveau d'efficacité protectrice.

Dans son communiqué du 23 novembre, AstraZeneca a apporté les premières données d'efficacité de son essai (3). Elle est évaluée à 70 % en moyenne sur tous les groupes étudiés, soit en dessous des efficacités annoncées par les trois premiers fabricants ayant présenté leurs données intermédiaires. L'évaluation a porté sur 131 cas de covid 19 survenus chez les participants à l'essai, mené au Royaume Uni et au Brésil. Aucune forme grave de l'infection n'a été observée chez les vaccinés.

De façon surprenante mais intéressante, le niveau de protection a été évalué à 90 % dans le groupe de volontaires pour lesquels la première dose de vaccin (2,5x1010 particules virales) était la moitié de la dose injectée aux autres participants. Pour A. Pollard, principal investigateur, ceci pourrait s'expliquer par le fait que ce dosage réduit, qui stimule moins fortement le système immunitaire, permet à la deuxième dose inoculée 28 jours plus tard de provoquer une réponse plus ample contre l'antigène du SARS-CoV-2.

En effet, un inconvénient du système choisi est qu'une réponse immunitaire se développe aussi contre les antigènes du vecteur, l'adénovirus du Chimpanzé. Cette réponse pourrait ensuite neutraliser les virus injectés lors des rappels et s'opposer à l'amplification attendue de la réponse contre l'antigène du coronavirus. Ce phénomène pourrait être particulièrement marqué pour les vaccins qui ont pour vecteur des adénovirus humains, comme ceux de Gamaleya ou de CanSino Biologics, car une partie de la population humaine est déjà immunisée contre ces virus souvent responsables d'infections respiratoires.

Le vaccin "Oxford" se présente donc à ce stade comme un bon candidat. Son efficacité pourrait s'établir au dessus de 70 % lorsqu'un dosage optimal de la première injection aura été déterminé. Sa tolérance est dans la norme, plutôt meilleure chez les personnes âgées qui sont une cible prioritaire pour la vaccination. Il est facile à conserver et son coût de production serait moindre que celui de ces concurrents. Les essais se poursuivent (ils doivent inclure 60 000 volontaires dans plusieurs pays) et leurs résultats seront soumis à l'évaluation de la communauté scientifique et des autorités de régulation. Les fabricants excluent toute idée de compétition entre eux, et l'arrivée de plusieurs vaccins aux caractéristiques et indications différentes aurait des avantages. AstraZeneca se dit prêt à produire 3 milliards de doses de AZD1222 en 2021.

Références

  1. N. Bar-Zeev et W.J. Moss. Encouraging results from phase 1/2 COVID-19 vaccine trials. The Lancet, July 20, 2020.
  2. M.N. Ramasamy, A.M. Minassian et coll. Safety and immunogenicity of ChAdOx1 nCoV-19 vaccine administered in a prime-boost regimen in young and old adults (COV002): a single-blind, randomised, controlled, phase 2/3 trial. The Lancet, Published online November 19, 2020.
  3. Communiqué de presse de AstraZeneca, 23 novembre 2020.

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