Efficacité de la vaccination antigrippale sur la grippe A biologiquement confirmée chez les patients âgés de 65 ans ou plus hospitalisés pour une forme grave de grippe
Les réseaux hospitaliers I-MOVE/I-MOVE+ (Influenza - Monitoring Vaccine Effectiveness in Europe) et VEBIS (Vaccine Effectiveness, Burden and Impact Studies) mènent depuis 2015/16 des études cas-témoins multicentriques saisonnières, avec test négatif, en Europe, afin de mesurer l’efficacité vaccinale contre la grippe (EVG).
Le revue BMC Medicine vient de publier les résultats d’une étude évaluant l’EVG vis-à-vis des sous-types de virus de la grippe A chez les personnes âgées de 65 ans ou plus, en fonction de la présence d’affections chroniques.
Les patients hospitalisés présentant une infection respiratoire aiguë sévère (IRAS) ont été prélevés dans les 7 jours suivant l’apparition des symptômes pour recherche de virus grippaux par RT-PCR. Les résultats sont issus des saisons grippales 2015/16 à 2023/24. Les cas étaient positifs à la RT-PCR pour la grippe A(H1N1)pdm09 ou A(H3N2) ; les témoins étaient négatifs pour tout virus grippal. L'efficacité vaccinale globale (EVG) a été calculée sur l'ensemble des saisons contre les virus grippaux A(H1N1)pdm09 et A(H3N2), ajustée en fonction du centre d'étude, du sexe, de l'âge et de la date d'apparition des symptômes ; et stratifiée selon le nombre et la présence de chaque affection chronique (diabète, cardiopathie, pneumopathie/asthme, immunosuppression, insuffisance rénale, hépatopathie, cancer, obésité). L’interaction entre la vaccination et chaque affection a été étudiée.
L'étude a inclus 1 805 cas de grippe A(H1N1)pdm09 et 16 329 témoins, et 2 590 cas de grippe A(H3N2) et 14 920 témoins, provenant de plus de 80 hôpitaux européens de 12 pays.
Sur l'ensemble des saisons, 63 à 67 % des cas et 70 % des témoins présentaient au moins deux affections chroniques. Les pathologies chroniques les plus fréquentes étaient, es maladies cardiaques (présente chez environ 67 % des patients atteints des deux sous-types et chez 73 % des témoins), les affections pulmonaires et l’asthme (40 % des cas des deux sous-types contre 46 % des témoins), et le diabète (33 % des cas des deux sous-types étaient des patients diabétiques, contre 38 % des témoins).
EV contre la grippe A(H1N1)pdm09
L'EV sur l'ensemble des saisons était de 37 % (IC à 95 % : 29-44) (39% chez les personnes âgées de 65 à 79 ans, 32% chez les personnes âgées de 80 ans ou plus).
Chez les personnes présentant 0, 1 et ≥ 2 affections chroniques l’EVG était respectivement de 49 % (IC à 95 % : 9-72), 30 % (IC à 95 % : 12-44) et 38 % (IC à 95 % : 29-46).
L’EV en fonction de l’affection chronique variait de 34 à 45 %, à l’exception de l’immunosuppression (-7 % ; IC à 95% : -61-29), de l’insuffisance rénale (17 % ; IC à 95% : -7-36) et des pathologies hépatiques (54 % ; IC à 95% : 24-72), mais les IC à 95 % se chevauchaient. Un lien significatif entre EV et pathologie a été observée pour l’insuffisance rénale (p = 0,02) et l’immunosuppression (p = 0,01).
Chez les personnes ayant reçu un vaccin à haute dose ou avec adjuvant, l’EV était supérieure de 3% à 7%, et inférieure de 10% à 27% chez celles ayant reçu tous les autres types de vaccins. Toutefois, les effectifs étaient faibles, les intervalles de confiance à 95 % larges et seulement trois sites ont été inclus dans l'analyse.
EV contre la grippe A(H3N2)
L'EV sur l'ensemble des saisons était de 17 % (IC à 95 % : 8-25) (30% chez les personnes âgées de 65 à 79 ans, 14% chez les personnes âgées de 80 ans ou plus).
Chez les personnes présentant 0, 1 et ≥ 2 affections chroniques l’EVG était respectivement de 15 % (IC à 95 % : -26-42), 11 % (IC à 95 % : -8-27) et 18 % (IC à 95 % : 7-28).
L’EV en fonction de l’affection chronique variait de de 13 à 25 %, à l’exception de l’immunosuppression (5 %), de l’insuffisance rénale (6 %) et de l’insuffisance hépatique (31 %), les intervalles de confiance à 95 % se chevauchant. Aucun lien significatif entre EV et pathologie chronique n’a été mis en évidence.
Les auteurs concluent que leur étude suggère une EV faible à modérée contre les sous-types de grippe A chez les patients atteints d'infections respiratoires aiguës sévères (IRAS) âgés de 65 ans et plus. Cette EV est plus élevée contre le sous-type A(H1N1)pdm09 que contre le sous-type A(H3N2), et la plupart des affections chroniques semblent avoir peu d'influence. Les auteurs insistent sur l'importance de développer des vaccins antigrippaux améliorés pour des populations spécifiques, notamment en raison de la faible EV observée de façon constante contre le sous-type A(H3N2). La faible EV observée contre les deux sous-types de grippe chez les personnes atteintes d'insuffisance rénale et les personnes immunodéprimées justifie des investigations complémentaires.