Vaccination contre la poliomyélite dans le monde : la place des vaccins inactivés renforcée

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Le document, publié dans le Relevé épidémiologique hebdomadaire du 28 février 2014, remplace celui de 2010. Il présente une synthèse actualisée de l'épidémiologie de la poliomyélite et des données d'efficacité et de sécurité des vaccins. Il intègre de nouvelles données relatives à l'introduction du vaccin poliomyélitique inactivé (VPI) dans les pays qui n'utilisaient que le vaccin oral (VPO), et à l'abandon du vaccin oral trivalent pour le vaccin bivalent.

La poliomyélite est une infection provoquée par des poliovirus de 3 sérotypes, 1, 2 et 3. Alors qu'elle faisait de nombreuses victimes dans les années 1950, chez les enfants mais aussi chez les adultes, un vaccin inactivé, trivalent et injectable, a été introduit en 1955. Le vaccin oral, également trivalent et composé de virus atténués, est devenu disponible en 1960. En 1974, ce vaccin oral, facile à administrer et peu coûteux, fut introduit dans le Programme élargi de vaccination mis au point pour les pays les plus démunis, avant de devenir, en 1988, l'outil principal du programme d'éradication de la poliomyélite dans ces mêmes pays. On dispose à présent de vaccins oraux monovalents pour les 3 sérotypes de virus, et d'un vaccin bivalent 1-3. Ils sont utilisés en fonction des situations épidémiologique et vaccinale locales.

Depuis 1988, la vaccination antipoliomyélitique généralisée a permis une réduction de plus de 99 % de l'incidence globale de la maladie. Dans le même temps, le nombre de pays où la maladie reste endémique est passé de 125 à 3, et le nombre de cas de poliomyélites déclarés dans le monde était de 223 en 2012 et 403 en 2013. De façon remarquable, on n'a plus observé de cas de poliomyélite à sérotype 2 sauvage depuis 1999. Depuis novembre 2012 et l'observation du denier cas d'infection par un virus de sérotype 3 sauvage, les cas qui continuent à se produire sont dus soit à des virus sauvages de type 1 (c'est le cas au Nigéria, en Afghanistan et au Pakistan où l'endémie reste présente), soit à des virus d'origine vaccinale excrétés par les sujets vaccinés avec le vaccin oral. Ce vaccin dont l'efficacité est amplement démontrée a été responsable d'effets indésirables graves de deux types restés l'un et l'autre très rares : des cas de poliomyélite paralytique associée à la vaccination (PPAV) qui concernent des sujets vaccinés et des sujets contacts non immunisés (2 à 4 cas par million et par an), et l'apparition de virus virulents dérivés du vaccin (PVDV). Le virus vaccinal de type 2 est responsable de 40 % des cas de poliomyélite consécutive à la vaccination. Les virus virulents dérivés du vaccin peuvent être mis en circulation et causer de petites épidémies. Ils peuvent être émis dans l'environnement pendant de longues périodes par des sujets vaccinés présentant de rares formes d'immunodéficience.

En raison de ce risque, et compte tenu du fait que le virus de type 2 sauvage a été éradiqué en 1999, l'OMS a recommandé que le VPO trivalent soit abandonné dans ses indications au profit du VPO 1-3 dès que possible.

Le vaccin injectable induit efficacement une réponse en anticorps circulants contre les trois types de virus polio dans tous les pays où il est utilisé, mais il n'induit pas de réponse muqueuse au niveau de l'intestin chez les sujets jamais immunisés auparavant. Il est très bien toléré, qu'il soit administré seul ou combiné à d'autres vaccins.

L'OMS recommande que tous les enfants du monde soient vaccinés contre la poliomyélite et que les efforts visant l'éradication soient poursuivis dans tous les pays. Cependant, il n'est plus recommandé de s'appuyer uniquement sur le vaccin oral. Dans tous les pays qui l'utilisent actuellement, une dose au moins de vaccin injectable doit être ajoutée au schéma de vaccination. Pour les pays d'endémie et ceux où existe un risque d'importation et de dissémination, il est recommandé d'administrer une dose de vaccin oral à la naissance, puis une primo-vaccination en 3 doses, et au moins une dose de vaccin injectable. La primo-vaccination peut être commencée à l'âge de 6 semaines et doit respecter un intervalle de 4 semaines entre chaque administration. Si une dose unique de vaccin injectable est utilisée, elle peut être administrée dès la 14ème semaine, moment où les anticorps maternels ont suffisamment diminué, si nécessaire simultanément avec une dose de vaccin oral. Le vaccin oral et le vaccin injectable peuvent être administrés simultanément avec les autres vaccins de l'enfant. Si le schéma de primo-vaccination par le VPO est commencé tard (après le 3ème mois), l'injection de la dose de vaccin inactivé devrait être effectuée lors de la première administration.

Pour les pays où la couverture vaccinale est élevée (90 à 95%) et le risque d'importation faible, si on craint l'émergence de souches pathogènes dérivées du vaccin, un schéma utilisant VPI puis VPO peut être utilisé. Après l'administration de 1 ou 2 doses de VPI, il est recommandé d'administrer au moins 2 doses de VPO, dans un schéma VPI-VPO-VPO à l'âge de 2 mois, ou un schéma VPI-VPI-VPO-VPO administré à 2 et 3-4 mois, suivi par au moins 2 doses de VPO.

Les pays où un haut niveau de couverture est maintenu et où les risques d'importation et de transmission de virus polio sauvages sont tous deux très faibles peuvent utiliser le seul vaccin injectable. Une primo-vaccination en 3 doses peut être commencée à l'âge de 2 mois. Si elle est commencée plus tôt, une dose de renforcement est recommandée après un intervalle d'au moins 6 mois (schéma en 4 doses).

Insistant sur la situation des pays où la poliomyélite reste endémique et de ceux où le risque d'importation de virus sauvages reste élevé, afin de limiter le risque d'une transmission non détectée, l'OMS déconseille l'application d'un schéma de vaccination séquentiel VPI-VPO ou l'utilisation du VPI seul. Elle recommande le schéma 3VPO-1VPI, et le renforcement des actions d'immunisation visant à éliminer la transmission du virus. Le basculement vers des schémas séquentiels VPI-VPO ou VPI seul, visant à réduire le risque de poliomyélite associée à la vaccination, ne devrait être envisagé qu'après évaluation rigoureuse de la situation épidémiologique.

En France, la poliomyélite est éliminée et seul le VPI est utilisé.

Source : Note de synthèse de l'OMS sur les vaccins antipoliomyélitiques - Janvier 2014. Relevé épidémiologique hebdomadaire, 28 février 2014, No. 9, 2014, 89, 73–92.

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