Rapport du Comité consultatif mondial de la sécurité vaccinale (GACVS), décembre 2013.

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Le Comité consultatif mondial de la sécurité vaccinale (GACVS, pour Global Advisory Committee on Vaccine Safety) est un groupe d'experts créé par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour analyser, autant que de besoin, les données relatives à la sécurité des vaccins disponibles à travers le monde et proposer des conduites à tenir. Le comité s'est réuni en décembre dernier pour examiner plusieurs sujets: les profils d'innocuité de trois vaccins (le vaccin chimère contre l'encéphalite japonaise, le vaccin antipoliomyélitique inactivé et le vaccin antirotavirus); les allégations mettant en doute l'innocuité des vaccins anti-papillomavirus humains (HPV); les enquêtes relatives à la pyrogénicité (déclenchement d'une fièvre) accrue du vaccin contre la grippe saisonnière ; et l'élaboration d'un manuel pour la surveillance de l'innocuité vaccinale au niveau mondial traitant des concepts essentiels à l'intention des administrateurs de programme de vaccination et du personnel chargé de la réglementation. Les conclusions de cette réunion viennent d'être publiées dans le Relevé épidémiologique hebdomadaire.

Vaccin chimère contre l'encéphalite japonaise

Il s'agit d'un vaccin vivant, produit par recombinaison ciblée de virus de la fièvre jaune atténué (virus 17D utilisé comme vaccin anti-amaril) et de virus de l'encéphalite japonaise également atténué (souche SA-14-14-2). Au cours des essais pré-homologation, le vaccin s'est montré immunogène, y compris lorsqu'il a été administré en même temps que le vaccin rougeole-oreillons-rubéole (ROR), et bien toléré, particulièrement chez l'adulte (les effets indésirables ont été moins fréquents qu'avec un vaccin plus ancien préparé sur cerveau de souriceau). Depuis, ce nouveau vaccin a été homologué en Australie, en Malaisie, aux Philippines et en Thaïlande, où il est disponible sous le nom d'Imojev®. Environ 49.000 doses ont à présent été utilisées, mais ce nombre est encore insuffisant pour permettre d'identifier les événements indésirables rares dont le vaccin pourrait être responsable. Il est également trop tôt pour savoir si un vaccin de ce type ne présentera pas un risque dans l'environnement, et le GACVS a exprimé son souhait d'être informé sur ce sujet. En effet, le virus artificiel qui a été créé pourrait évoluer de façon inattendue s'il trouvait à infecter des hôtes nombreux et variés, par exemple en se recombinant.

La probabilité d'un tel événement est considérée comme faible, puisque le virus provoque une virémie très brève chez l'homme et qu'il n'est pas capable d'infecter efficacement les moustiques. Son utilisation à grande échelle pourrait toutefois créer des opportunités, et la surveillance des événements indésirables post-vaccinaux est donc nécessaire. Ce risque de voir émerger des virus pathogènes à partir de vaccins se trouverait toutefois accru si d'autres vaccins à très large diffusion conçus sur le modèle de l'Imojev®, tel le candidat vaccin contre la dengue de Sanofi, venaient également à être utilisés (NDR).

Vaccin antipoliomyélitique inactivé (VPI)

Ce vaccin est appelé à être très largement utilisé par des pays qui doivent renoncer à l'utilisation du vaccin poliomyélitique oral afin de parvenir à l'objectif d'éradication de cette affection. Le GACVS a donc passé en revue les données des essais cliniques menés lors de l'élaboration du vaccin administré seul ou en association, les rapports de manifestations postvaccinales indésirables (MAPI) relatifs au VPI provenant du Système américain de notification des manifestations postvaccinales indésirables (VAERS) et les questions posées par le processus de fabrication du VPI. A l'issue de cet examen, le comité s'est déclaré «convaincu que le VPI et les vaccins contenant le VPI présentent un excellent profil d'innocuité». Cette innocuité est toutefois le fruit d'un processus de fabrication complexe, qui garantit l'absence de pouvoir pathogène résiduel dans le vaccin et évite toute contamination. Si cette fabrication devait être effectuée par des fabricants des pays émergents, un soutien technique, une formation et une supervision devraient leur être fournis.

Vaccin antirotavirus

En 2011, le GACVS avait conclu que les deux vaccins antirotavirus disponibles, Rotateq® et Rotarix®, étaient sûrs, mais qu'ils étaient associés à un risque accru d'invagination après la première dose de vaccin dans certaines populations. Lors de la dernière réunion, de nouvelles données en provenance d'Australie et des États-Unis ont été examinées. Les données australiennes montrent que les deux vaccins entraînent un risque significatif d'invagination, après la 1ère et la 2ème dose: l'incidence de la pathologie est augmentée de 5,6 cas pour 100.000 nourrissons, observés entre les 1er et 21ème jours après la 1ère injection et entre les 1er et 7ème jours après la 2ème. L'incidence observée est plus faible aux USA, et semble t-il différente pour les deux vaccins. Le GAVCS a retenu que les études confirmaient un risque d'invagination pour les deux vaccins, particulièrement dans la 1ère semaine suivant l'administration d'une 1ère dose. Ce risque est variable selon les études, soit en raison de différences dans les seuils de référence, soit pour des raisons méthodologiques, mais il reste faible au regard des bénéfices apportés par la vaccination. La surveillance des effets indésirables doit toutefois être poursuivie, l'incidence des complications se révélant différente selon les populations.

Innocuité des vaccins anti-papillomavirus humains

Le Comité a pris en compte les données recueillies alors que plus de 175 millions de doses des deux vaccins, Cervarix® et Gardasil®, ont à présent été administrées. Il s'est déclaré satisfait du profil d'innocuité des deux produits, constatant que leur responsabilité dans des événements graves tels que syndrome de Guillain-Barré, convulsions, accident vasculaire cérébral, thrombo-embolie veineuse, anaphylaxie ou autres réactions allergiques n'avait pas été établie malgré des enquêtes approfondies. Chez des femmes enceintes vaccinées par inadvertance, il n'a pas non plus été constaté d'augmentation d'effets indésirables imputable aux vaccins. Les nombreuses études effectuées dans les pays (dont la France) où les vaccins ont été accusés de provoquer des maladies auto-immunes démyélinisantes ou des accidents thromboemboliques ne montrent pas d'augmentation de l'incidence de ces maladies imputable à la vaccination. Le Comité a toutefois recommandé que la surveillance soit poursuivie, les allégations de dommages dus à la vaccination basées sur des données incomplètes pouvant avoir des conséquences néfastes.

Survenue de convulsions fébriles après vaccination antigrippale

Des accès fébriles parfois accompagnés de convulsions ont été observés de façon anormale après administration du vaccin trivalent Fluvax® fabriqué en Australie, en particulier chez des enfants de moins de 5 ans. Aucun autre vaccin trivalent n'a produit ces effets. Le Fluvax® est désormais contre-indiqué chez les enfants de moins de 5 ans et doit être évité chez ceux de moins de 9 ans. Son fabricant a pu établir que la persistance d'ARN viral dans le produit commercialisé était l'un des facteurs pouvant expliquer son pouvoir pyrogène. Il doit modifier son processus de fabrication, différent de celui des autres fabricants de vaccins antigrippaux, et il est attendu que cette modification atténuera ou fera disparaitre l'effet indésirable observé.

Finalement, le GACVS encourage la rédaction d'un manuel traitant du suivi des effets indésirables des vaccins, à l'intention en premier lieu des administrateurs de programme de vaccination et des autorités chargées de la réglementation. Ce manuel, qui s'inspirera d'un travail déjà effectué par le Bureau régional OMS du Pacifique occidental, ne doit pas « être exhaustif s'agissant de l'ensemble des principes et méthodes de suivi de l'innocuité vaccinale. Il doit toutefois fournir des liens vers les outils de référence et documents appropriés. Le nouveau manuel doit par conséquent se limiter dans son contenu à une explication de la nécessité et des principes de base de l'évaluation de la causalité, ainsi que de son but, ses principes généraux et ses résultats, pour laisser de côté les discussions techniques plus poussées ».

Source : Relevé épidémiologique hebdomadaire, 14 février 2014, No. 7, 2014, 89, 53–60.

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